Duo bordelais, Blackbird Hill sort avec Razzle dazzle son tout premier long format. Adepte d’un blues-rock qui doit autant à Led’ Zep qu’aux road trips ou à la mouvance « folky », l’équilibre étant ici aisément trouvé entre ces différentes orientations. On oscille en effet, sous la houlette de Maxime Conan (guitare, chant) et Théo Jude (batterie, chant) entre des rocks plutôt bourrus (un On the rocks aux riffs lourds, à la voix autant aiguë qu’aérienne, en ouverture), effluves blues en vue, et instants bien plus posés, comme peut l’être Wreckage où le jeu fin de Conan fait étinceler l’effort. Je l’attendais pour ma part plus puissant, ce disque. Mais il tient ses promesses, sincère et agréable de morceau en morceau. Sans révolutionner le genre, mais en y puisant ce qu’il y a de meilleur, en y mettant de l’âme et de la vérité, on trousse un opus qualitatif. Watery eyes, subtilement pénétrant, validant d’ailleurs de façon probante l’option entre soie et étoffe rêche de la paire aquitaine. On n’est pas dans le maquillage, contrairement à cette belle pochette consistant en un travail de décor et de maquillage de Cassandre Gois, photographié par Vincent Hébet. On joue sans fard, sans déployer d’artifice dommageable.
On est par conséquent crédible, Smoke & mirrors renvoie à ce dosage habile entre rock musclé et touche presque psyché dans le chant, à l’envergure certaine. Si la retenue est souvent de mise, elle n’écorne pas le contenu. Elle se pare en outre de franches attaques, qui ont entre autres vertus celle de faire briller les mélopées des deux hommes.
Cut the boards, à la moitié du voyage, marie parfaitement les tendances avouées du groupe: blues et rock, couchés entre passé et modernité dans le son, y avancent de front. Blackbird Hill maîtrise son jargon, place sur le dit morceau des choeurs envoûtants. Ecouté à volume élevé, Razzle dazzle rendra tout son jus. A l’image du combo sur scène, où l’écorché prend le dessus et où l’on joue, encore une fois, intensément, en vivant le moment. On trompe parfois, toutefois, son monde. Mais c’est pour mieux s’affirmer, pour mieux poser les fondements de ce que l’on entreprend. Wade in black water, en effet, s’appuie initialement sur des bases tranquilles mais prend vite la tangente, avant de retomber dans une douceur viciée réellement prenante. Puis To & fros, trépidant, se vautre lui dans des eaux rock truffées de remous. Il est bon, ce Razzle dazzle. La scène bordelaise, déjà florissante, ne s’en portera que mieux encore. Blackbird Hill a d’ailleurs débuté une tournée début février; celle-ci s’étendra sur plus de 10 dates et vous donnera l’opportunité d’aller « checker » en salle obscure l’impact du clan, décuplé par une récente résidence à la Nef d’Angoulême.
Lien Release party au Krakatoa
Les guitares, quand elles parlent, recourent à un vocable entre le dru et le sensible (Two wolves). Ca fait son effet, elles sont de plus imaginatives et lâchent des plans attrayants. Il y a de l’unité dans ce projet, qu’on sent bien campé. The tide, à l’instar de plusieurs autres esquisses, jongle entre le céleste et des embardées énervées. Bien qu’assez souvent bridé, j’entends par là rarement entièrement endiablé, l’album ne souffre d’aucun manquement. Breezing away le conclut ainsi de manière douce, guitare-voix pour toute parure, au terme donc d’un disque sans écarts qui aurait tout juste, à mon sens, gagné à s’enflammer de manière moins sporadique.