De ces gars de Nottingham très recommandables, je ne possède que l’excellent The way I feel today, sorti en 2001. Pop et rock y créent la surprise et bon nombre de morceaux s’y distinguent, animés tantôt par un éclat pop, tantôt par une rage rock fulgurante. Ayant perdu le groupe de vue, me voilà à fouiner sur son Bandcamp où je déniche, comble de la -bonne- surprise, un nombre conséquent de nouvelles sorties, récentes, qui flirtent cette fois avec le kraut-rock et n’hésitent pas à envoyer du long format, soutenu et hypnotique (Black Pilled Kafka et ses 12 minutes de kraut cosmique mais cadencé), sur ce Dream on que je décris ici simplement parce qu’il est le dernier opus en date des Anglais. Et qu’il est bon, très bon, comme l’est entre autres leur Das ist England sorti quelques mois auparavant. Dans une mue sonique qui leur sied à ravir, Chris Olley et son band font dans le space rock, ne laissant toutefois jamais sur la touche leurs élans soniques qui, eux aussi, charpentent leur oeuvre comme il se doit. Mais aussi leurs perverses sucreries ouatées, disséminées dans de fringantes collections de chansons.
On entre toutefois dans leur univers, ici, par une épopée spatiale, haut perchée et longue de 15 minutes, qui après une longue intro gagne en vivacité, provoque un trip psych-kraut d’entre les étoiles, aussi léger que bruitiste, aux séquences expérimentales impressionnantes (Mind Pickled Delerium Sauce). L’ambiance est plantée: des traces noisy ornent la fin du titre et déjà, nos esprits sont malmenés, stimulés par le savoir-faire du groupe dans cette option complètement maîtrisée bien que libre de ton. Tout ça pour retomber entièrement, ensuite, sur le format bien plus réduit d’un Hey kid entre pop et post-rock, caressant. Avant que Dream on, exercice kraut obsédant, ne plante une nouvelle banderille. Précédant le Black Pilled Kafka psychotrope à souhait nommé plus haut, qui bien entendu conforte Six By Seven dans ce qu’il entreprend.
Audacieux, sans normes réductrices si ce n’est celle de laisser libre cours à ses errances, il délivre plus loin un Call me A call me B barré et rêveur, aux zébrures sonores triturées. Plus que jamais « free », le groupe confirme avec Daily White Tablet, kraut (décidément), obscur, troué lui aussi par des sons que Liars aurait estimés. Puis il récidive suivant une durée conséquente, livrant son probant And No One Knows Your Name. Kraut une fois de plus, dans ce savant dosage entre cosmisme, légèreté et touches bruyantes, selon un procédé bien à lui. Ludique et en perpétuelle investigation, Six By Seven est ici au sommet de sa créativité, porté par une démarche indépendante et une versatilité dans les climats qui suscite un intérêt constant. Si on pourrait le qualifier de décousu, s’il passe en certaines occasions du coq à l’âne, il trousse au final des essais captivants. Dans une variété qui bouscule les sens, cogne et berce, secoue et apaise, provoquant des sensations à la lisière de l’indélébile.
En sa fin, Dream on dévoile dans un premier temps Boxer and clover, court morceau dépaysant qui aurait mérité de s’étendre, de pousser plus en avant ses notes singulières. Et pour finir, ce I Wanna Be Some Wanna Be sensible, doucereux mais troublé dans son décor, qui couronne un travail accompli. Précisons par ailleurs qu’au sein de la brouettée d’albums parus récemment, tous valent qu’on s’y attarde, que ce soit Love And Peace And Sympathy (novembre 2019) ou le Das ist England nommé en ces lignes (novembre 2019 également), ou encore et parmi d’autres The World Hates Me And The Feeling Is Mutual (décembre 2018) et ABSTRAKTION 12 (juin 2018).