Duo arrageois aux influences multiples, qui ici entrent en collision avec un certain bonheur, Baasta se compose de François-Xavier Notel et Yoann Dirryckx. Il a derrière lui un premier EP (Sales gosses, début 2018), une participation au Main Square de leur ville et des déblayages de scène pour Pogo Car Crash Control, Mass Hysteria, Deus, Triggerfinger, Bodega, MNNQNS ou encore The KVB. Plutôt pas mal, sachant qu’ils s’apprêtent aussi à ouvrir pour Frustration en mai prochain. Ils sont aussi fans de Liam Gallagher -on le leur pardonnera aisément-, et avouent en termes d’influences aimer les 2 tchatcheurs sociétaux de Sleaford Mods. Ca les honore et s’ils ont d’ores et déjà des arguments à faire valoir, le meilleur d’entre eux tient dans le contenu de Paanic, ce premier album pluriel dans les genres, au groove omniprésent.
Avec l’éponyme Paanic, ou post-punk et sons à la Gang of Four se font entendre sur un ton dansant, au refrain immédiatement mémorisable, une identité émane. « Ca va ça va ça vaaa!! », tend t-on alors à se dire, émoustillé par cette entrée en matière probante. Que Loser, vif et moqueur, aux sonorités inspirées, homologue sans coup férir. On est sacrément bien parti, il s’agit toutefois de rester dans les clous, ceux d’une attitude, également, punk dans le terme et le dédain affiché en certains endroits. Aucun souci, Fosbury et sa fusion à base de rock, hip-hop et électro s’en charge. J’en jurerais pourtant, « ..la révolution ne sera pas podcastée » résulte d’un emprunt à Experience, le projet de Michel Cloup dans les 2000’s avec entre autres Francis Esteves. Il y a pire comme provenance et quoiqu’il en soit, on se trémousse sur les morceaux de Paanic, tous au dessus de la moyenne. Car dorénavant, la rue ne pardonne plus (celle-là, c’est moi qui la leur emprunte; j’avais envie de la placer, elle me plaît et fait partie nombreuses des sentences à retenir dans l’oeuvre des nordistes).
Sur Le soir des lions (j’en profite pour dire que Slaves est à ranger dans le rayon des bons goûts de ces 2 là), y’a d’la gouaille à la Dutronc. Une ligne de basse fatale, à la…Sleaford Mods, fait monter la sauce. Ca passe crème, une fois de plus. Baasta a de plus la science du petit détail, du son incrusté qui fait pulser le bazar. La fin du monde, électro en son début mais pas seulement car il vire ensuite en post-punk décoré au synthé, nous fait « danser sur la fin du monde ». L’idée est attrayante, le verbe dézingue encore et en l’occurrence, il vise l’insignifiant. Ca tombe bien, c’est lui qui nous gouverne et, aussi, nous entoure dès lors qu’on fout les pieds dehors ou qu’on allume un écran. Arrivés à la moitié de leur opus, Notel et Dirryckx n’ont aucun creux à relever. Jamais, lent hip-hop électroïde aux reflets funky, lâche son name-dropping et fait à son tour onduler l’auditoire. On est dans le brassage, pas très sage, de genres variés. Ballerine, sons électro en tête, balourde alors ses saccades rapisantes que des sonorités notables viennent supporter, avant de tracer tous azimuts. Le chant en Français, utilisé de bout en bout de l’album, franchissant l’épreuve avec panache.
Adroit dans ses collages, Baasta continue à performer avec Ton camp, qui s’appuie sur un pouls funky (la basse, une fois de plus, flingue tout). Il nous lègue, à nouveau, du verbe qui coupe les têtes. Un rock batailleur s’invite à la fête, où ne seront pas conviés les adeptes du paraître. Ca tombe bien, encore; eux aussi pullulent. Tora! Tora! Tora! (les mecs se croient chez Fleischer, ça promet..), avant-dernière salve à la Slaves d’un album sans faiblesses mais qui met des coups de pied aux fesses, fait la chasse aux cons. La mission est périlleuse, exigeante, mais Paanic nous séduira jusqu’à ses dernières croches.
Ainsi Choisis la vie, « ode » à la consommation impensée et aux attitudes « moutonnisantes », suinte pour finir un rock rentre-dedans, orné de sons en boucles. Il incite à choisir la vie et dans le même élan, assied de façon péremptoire la valeur d’un disque grandement méritant, dont le début que je réécoute déjà me fait penser, et ce n’est pas un petit compliment, à Dutronc qui aurait flirté avec le Welcome to Julian de Surfing on a t-bone.