Adapte d’un rap-gaze à l’apparition duquel il a fortement contribué, le projet Moodie Black se fend régulièrement, depuis plus de 10 ans, de sorties irrévérencieuses où son flow sombre percute guitares en fusion, rythmes indus, hip-hop ou électro, pour des rendus singuliers. Ici, il rassemble des b-sides soi-disant détestées, sous l’appellation b-sides i hate, qu’on s’empressera pourtant d’aimer. Pour leur différence, leur qualité, et leurs sonorités sans esbrouffe qui ornent par exemple So good, so long. Entre coloration bluesy, rythme lancinant aux effets psyché et vapeur shoegaze, on a déjà entre les mains une b-side du niveau d’une a-side et connaissant les 2 protagonistes, on ne doute pas une seconde de la bonne tenue du reste. Caskets, où la voix dévie, délivre ainsi un rap brumeux, menaçant, qui annonce l’implosion sans qu’elle n’arrive. Et Duper b, leste, climatique, ratifie la valeur d’un trio d’ouverture garanti toute épreuve. A l’image d’ailleurs de la « totale » Moodie Black, tel le Lucas Acid de haute volée sorti en avril 2018. Moodie Black se montrant, en plus d’une productivité qui ne manquera pas de satisfaire son auditoire, intègre à souhait.
S’il expérimente, le groupe tient la barre d’un son nouveau, innovant, indocile, aux déflagrations démentielles (Grip, bruitiste et pesant). Irrévérencieux dans le verbe, mutin dans le son, il démontre qu’au sein du carcan hip-hop, il y a de belles choses à faire pour peu qu’on fasse preuve d’imagination. Grammy death, fort lui aussi de ces bruits inédits, puis The wall, sur une cadence massive, affirment le genre et au delà, la fiabilité de morceaux bien plus valeureux que de simples faces B. Preuve en est, l’idée -louable- de les unir ici.
Avec Deathen l’horizon, si on peut dire, s’éclaircit quelque peu. On reste toutefois dans un mot sombre, un étaiement sans vive lumière. Pour le coup, il est simplement moins opaque. Weekend, ensuite, se pare de voix douces greffées à d’autres évidemment nettement plus graves. Sur ce lit bruitiste, ça prend sans problèmes. Le panel parcouru par Moodie Black depuis ses parutions initiales est de plus parfaitement illustré, entre coups de semonce ingénieusement bruyants et canevas -modérément- plus sobres. Il n’empêche, Landgun livre quand vient son tour des chants d’obédience gospel, qui trouvent leur rang sans forcer. Puis Wing, traînée ombreuse doublée d’un rythme indus, de ces envolées bruitistes dont le duo retient le secret, termine le boulot avec pour effet d’alléger l’attente, pressante, du nouvel opus prévu pour mars 2020, qui répondra au nom ajusté de Fuzz. On en ignore encore le contenu mais la paire de Los Angeles saura sans nul doute combler nos désirs les plus vils, à grand renfort de rap-gaze et noise-rap millésimé.