Quatuor de « musique psychédélique d’Auvergne », Super Parquet est né de la rencontre entre Louis Jacques, passé de Châteauroux à Lyon dans le but d’y optimiser sa pratique de la cornemuse, et la paire Julien Baratay/Simon Drouhin, issue des musiques électroniques et fréquentant elle aussi le CEFEDEM, école de musique de la ville. Le trio recrutant ensuite Antoine Cognet au banjo avant de parcourir le milieu bals/trad, mais aussi les squats et lieux underground, finissant par croiser Tangui, programmateur de la scène Gwernig des Vieilles Charrues, qui deviendra leur manager.
Aujourd’hui sont donc posées les bases d’une musique hybride, sur ce disque éponyme surprenant. Celui-ci combinant trad jamais en rade, donc, élans électroniques et drones comme sur l’excellent Fourmi qui débute en version bal du village, ou plutôt de région et de manière singulière, porté par un rythme marqué et, surtout, nourri par le talent de composition, de brassage même, de ses auteurs. Ici, on mêle machines et bourdons électriques, banjo, cabrette, voix et effets pour créer un univers entièrement décalé, ancré dans le passé mais porteur d’un son au delà de l’actuel. Le pont est créé avec brio, des zébrures drones s’incrustent dans le registre, un peu comme si Sonic Youth jouait le second volet de son Mote au sein des compositions de Super Parquet. 4 chaussures, qui ouvre…le bal, dévoilant déjà un rendu hors du commun, bien plus estimable qu’un simple collage stylistique dénué d’originalité. C’est à un télescopage pensé, audacieux et aucunement convenu, que s’attelle le groupe.
Est ainsi fondé un répertoire, fruit des nombreuses dates assurées par les comparses, de nature à rassembler et à remettre au goût du jour, sous un angle singulier, des musiques dites « du passé ». Adieu instaure du chant, la cohésion entre ces 4 là est évidente. C’est le choc des cultures, rarement un son aura à ce point donné l’impression d’unir, sous les mêmes notes, un tel panel sociétal. Le tout sous le joug de ces drones noirs, tel celui qui termine cette Fourmi-Bourrée courte. Laquelle outrepasse, tout de même, les 7 minutes. Au bal populaire, sans en avoir l’air, on jour de superbes airs. Dans le préau d’une école, dans les troquets, en milieu désaffecté, au lycée agricole, au carnaval ou à la fête de la Musique et j’en omets une belle flopée, Super Parquet détient un pouvoir d’attraction, d’unification, étonnant. Super Parquet est d’ailleurs joueur; avec les sons, avec les genres, avec les gens. Avec les ères, aussi.
Octobre, inqualifiable, s’impose à force de répétition. Psyché de par cette redite obsédante, il fait mouche à son tour. C’est sur plus de 10 mns qu’il déploie ses effluves lancinantes, hypnotiques, pour consacrer une formule décidément inédite. JMD 134 suit, son électro souterraine y épouse le panel populaire avec un bel entrain. Soniquement, l’inventivité est de mise, voire bluffante. Dans les sentiers empruntés également, jamais prévisibles. Voilà une bouffée d’air frais, du jamais entendu qu’il faut certes « dompter » mais qui, si l’effort est consenti, génère des sensations prononcées. Que Mars, entre ferveur « trad » et techno de rave -ou de rêve-, réactive en toute fin d’album, en prenant fin dans une étoffe noisy réellement enivrante. Inégalable. Je me rends alors compte qu’un premier EP, dont transparaît la même folle fièvre créatrice, est sorti en septembre 2015. Raison de plus pour aller explorer l’oeuvre d’un Super Parquet qu’on aura désormais l’envie de fouler en tournoyant, au son de ce clan hors-cadre.