Musicien et compositeur Allemand, Jochen Tiberius Koch a déjà sorti 2 EP sous un nom différent et un album avec Schole Records (Walden, juin 2018). Créateur d’un univers hybride mi-majestueux/mi-inquiétant, il collabore sur ce Astoria avec le Schmalkalden Philharmonic Orchestra et 2 chanteuses qui, en plus du timbre grave de notre homme, étayent joliment quelques morceaux de l’opus. Celui-ci relatant l’histoire de…l’Astoria, hôtel construit en 1915 à Leipzig, qui a tout vécu dont la guerre, a été abîmé pour ensuite de venir l’un des plus beaux édifices du pays.
Le procédé est donc singulier et le rendu, lui, a le mérite de s’imprégner de cordes, et de textures électroniques bien disséminées, pour établir des climats envoûtants. Les intervenants y sont nombreux, le spoken word de RAINER C. HERZMANN sur Prolog donne déjà quelque chose d’attrayant. Minna et Fraülein Laura y vont aussi de leur timbre marquant; si la seconde conclut avec Epilog, voix et piano, nappes de fond sombres suffisant à en faire le charme, la première illumine par exemple Behind the backdrop, à la songerie animée, après que MANFRED KROOG ait de son côté apporté ses mots « dark » à l’excellent Sunrising, fort d’incrustes électro dont les synthés froids surplombent les notes classiques.
Imaginatif, Koch conçoit une musique sobre, bien que « chargée » en instruments et pratiquants, au clair-obscur seyant. Ses sons enveloppent, la variété des chants émanant des « guests » permettent une palette étendue. A la fois pure et grise, celle-ci fait d’Astoria un disque prenant. L’usage de la langue allemande, de machines à la froideur étayante, y contribuent. The lobby boys, à l’image de ce que « JTK » construit, marie sonorités claires et décor à mi-chemin du serein et de l’ombragé. Il est évident que la particularité d’Astoria, sa teneur inédite, participent à la séduction exercée au fil des morceaux. Qui, sous le joug d’un bruit, ou d’un rythme, se distinguent. C’est le cas de 33/45, aux cloches lugubres en son début, où Minna chante élégamment, avec émotion
Il serait toutefois bon qu’Astoria, qui brille lorsqu’il s’emporte, dévie plus fréquemment. After the war, racé dans ses penchants gris, illustre cela; les cordes l’emmènent, lui donnent du coffre, mais ne le font pas réellement décoller. L’ouvrage est, rappelons-le, peaufiné, ouvragé, et ne manque pas de chien. Il serait juste, à mon sens, plus probant encore si ses humeurs, bien plantées, se montraient encore plus versatiles, si ses écarts poussaient leur chemin plus loin. Ce qui n’entrave pas, malgré ça, la personnalité d’un album collectif et créatif, engendré par un artiste n’ayant de cesse de creuser un champ individuel, audacieux, qui le met incontestablement à l’honneur.