A Amiens on a des paires qui, une fois réunies, font la paire sans commettre d’impair. Et pas qu’une, mais plutôt une paire mon ptit père! Pierre et Mario (AKA Pierre et le Lou), frères complices. Etienne et Mathilde, couple inventif, soit Mercure Express. Et puis il y a Erwann et Delphine. Arrêtez de rigoler c’est pas rigolo, et de toute façon je déconne pas; ils forment, à 2, Amour Formica. Sous ce patronyme sentimental joliment protégé, ils viennent de commettre non pas un impair mais un EP. Arrêtez de rigoler c’est pas rigolo, c’est son nom et ce n’est pas son intitulé qui m’a donné envie d’en parler, mais plutôt les qualités de ce duo qui, lors d’un Bruits de Lune remontant déjà à quelques mois, m’avait dangereusement plu. Alors quand j’ai su qu’ils sortaient du son, Erwann m’ayant gentiment refilé de quoi écouter le bazar, j’étais bien content. Parce qu’en plus, Marius, ils sont gentils comme tout.
A l’écoute (je précise qu’il m’a tout de même fallu passer par Hexagonistan, compil’ issue de chez Alter K où figure Amour Formica, pour enfin écrire au sujet de ces 2 là), mon enthousiasme ne prendra pas la poudre d’escampette. Intact, c’est de son qu’il s’enivrera. Pas de poudre, pas de pilules; du son. Des chants. Français, Allemands, et des mots jamais sots. Des notes. Froides, plus enjouées parfois, synthétiques, et des climats. Doux, cold, personnels. Car voilà ce qu’on trouve quand on presse le bouton PLAY. En plus de ça, Monsieur Choquenet et Madame Barthélemy débutent par une fête d’anniversaire, cold et atmosphérique. Chant rêveur, enveloppe sobre et plutôt alerte font que déjà, on adhère. Il y a là de l’amour, de l’ironie, de la joie et du désenchantement et au bout de tout ça, de l’espoir. Ca s’appelle la vie. Recouverte de formica, pour la préserver. Il n’y a lors plus qu’à bouffer l’gâteau (d’anniversaire).
Il n’empêche, tout ça, c’est de la Musique d’ascenseur. C’est pas moi qui l’invente, c’est eux qui le disent. Sauf que moi, si tu mets cette zik là dans l’ascenseur, je le prends 37 fois et j’accepte d’y rester bloqué (pas avec n’importe qui, cependant). Parce que cette Musique d’ascenseur, elle séduit. Jazzy, cool à t’en filer la chair de poule, elle déroule. Le zigue et la donzelle, doués, s’accordent jusque dans le désaccord. Leur Kabarett, enfumé, saccadé, donne vie de s’y terrer. En plus de ça, il me fait penser à Kas Product. Et puis, j’adore le chant en Allemand et les ritournelles de claviers qui dérapent. C’est cold, ça refuse la conformité. Et ça te balourde de la classe, et puis gentiment ça tabasse. Ces gens là n’ont plus 20 ans, ce ne sont pourtant pas des vétérans mais ils tiennent leur rang. Toi qui as 20 ans, justement, tu ferais bien de leur accorder toute ton attention, moussaillon.
La Bretagne, ça vous gagne (le morceau qui, justement, s’est retrouvé sur « Hexagonistan« ), prétendent-ils. Vrai! Mais elle ne vous gagne pas comme ça. Ca tombe pas du ciel pour arriver, tout chaud, sur une table en formica. Pour arriver à ses fins, elle (la Bretagne) tisse une trame fine, subtile, que des inserts cold sertissent. C’est ficelé, encore une fois, avec une sacrée dose d’imagination. Psyché et barré dans la brume, Amour Formica te fait, musicalement, l’amour. Et puis, parce que c’est pas encore assez, il te refile aussi du verbe qui ne peut naître que d’esprits féconds (et non pas faits cons). L’Ep, que j’adore mais auquel j’aurais adjoint un supplément « sauvage », direct et cadencé à souhait, est magnifique. Pyromanie, qui met le feu sans s’enflammer plus que ça, le termine dans une veine électro méditative, hypnotique, qui achève d’en faire un objet que de toute façon, il faut se procurer. Car la zik à la Amour Formica, elle ne se décrit pas (c’est bien pour ça que je l’évoque ici…); elle s’écoute, elle se voit live, elle se partage. Arrêtez de rigoler, c’est pas rigolo: écoutez, vous risquez tout au plus de succomber.