Projet incluant principalement l’irlando-berlinois Sean Mulrooney, qui a enregistré ce disque (à Berlin justement), après un premier format sorti en 2016 et répondant au nom de Tau Tau Tau, TAU sort avec ce And the drones of praise son second opus. On y trouve plusieurs collaborateurs de choix, parmi lesquels siègent la légende afrofuturiste Idris Ackamoor, Earl Harvin des Tindersticks, des membres de la nouvelle génération de la musique classique indienne (dont les LN Sisters), ou encore, last but not least, Knox Chandler (Siouxsie & the Banshees).
Côté production c’est Robbie Moore, propriétaire du studio où le disque fut enregistré, qui s’y colle. Et tout ce beau monde enfante un album de choix, varié, qui débute par la déjante d’un It’s already written dépaysant, ethno-psyché, où des choeurs féminins répondent au chant sur fond de musique baladeuse, empreinte d’une douce folie et emportée par un flux ici presque tribal. D’emblée donc, TAU embarque ses aficionados; ses cuivres free l’y aident, la magie de ce premier titre crée la surprise et distingue l’ensemble. Suit un Tonatieu digne des moments les plus mystiques d’un Wovenhand, à la portée émotionnelle certaine. A la fois moderne et ancré dans l’ancien, And the drones of praise surprend et se veut le reflet d’une identité sonique peaufinée par le groupe à l’occasion de ses sorties live notamment. Le morceau cité, lentement, s’électrifie et délivre des ruades électriques de bon aloi auxquelles succèdent des plans plus « world ».
A l’issue, TAU se dénude avec Craw, ténu, atmosphérique, aux cordes avenantes. La diversité est de mise, elle peut dérouter mais sa qualité incite à poursuivre l’écoute. On tombe ainsi, dans la foulée, sur New medicine, plus indé dans son contenu. Superbe chanson qu’un Dandy Warhols n’aurait pas reniée, elle nous amène au mitan de la traversée avec une pétulance retenue qui réjouit au plus haut point. Puis des élans « d’antan » se font à nouveau entendre sur le majestueux Erasitexnis, au déroulé psyché lancinant. Vocalement comme dans l’étayage, sobre et judicieux, TAU touche la cible. Sur The sturgeon, il nous convie à une farandole psyché cadencée, entêtante, qui dérouillera les membres inférieurs. Avec, comme de coutume, cette science du son venu d’ailleurs qui soutient le tout avec efficience.
L’écoute passe vite quand le son est bon; on en est presque à sa fin et Dance of the traps impose à ce moment son enveloppe sombre, leste, où mur du son et vocaux s’acoquinent dans la pertinence tout en se montrant impertinents. La toute fin survient ensuite sous la forme de The seer, délié mais intense, bridé dans ses excès. Un bel exercice donc, pour conclure un album de grande qualité, aux interventions extérieures bénéfiques et aux nombreuses trouvailles soniques favorables.
Photo: Charlotte Romer.