Je me plais à le dire, il me, il NOUS le confirme avec brio chaque année; le Celebration Days Festival de Cernoy, niché dans la quiétude forestière, est le plus vrai des événements estivaux. Pour ses 10 ans et sa « 11ème », il nous a de plus, chose appréciable et qui pointait déjà l’année passée, fait le bonheur d’étendre plus encore son éventail sonore et musical, sur 3 jours « as usual ». On ne peut que l’en remercier; il nous a derechef enchantés.
Ainsi et à l’issue d’un trajet qu’on effectue désormais avec délices, le temps de passer par la caravane d’accueil, nous voilà plongés dans un univers parallèle, bienfaisant, bienveillant, au carrefour des époques, maintenant, et des tendances musicales. On y passe, de fait, de découverte en découverte; Braziliers, soit Ropoporose et Piano Chat réunis, ouvre le bal estival avec maestria. La « petite » scène a été repensée; exit le bois, c’est à l’heure actuelle une vraie structure scénique, preuve parmi d’autres de l’avancée du CDF, qui accueille les musiciens. On va vivre, avec délectation, une première soirée dingue et enivrante, dotée de sonorités multiples; rock’n’roll avec The C33s, plus folky avec Ill Wicker, climatique avec…les bien nommés Nouveaux Climats. Le cocktail est déjà sévèrement dosé; il prend de l’ampleur avec Les Grys Grys, eux aussi rock jusqu’au bout des cordes, tandis qu’Orgel Vreten cuivre les sous-bois pour, à son tour, nous emmener dans un ailleurs salvateur.
A ces formations qu’on plébiscitera, il convient d’ajouter Gangbe Brass Band et le DJ Set du Mangedisc, qui prolongent la danse-transe et le plaisir jusqu’à pas d’heure. Le tout impeccablement maîtrisé par une équipe rodée et sans failles, c’est d’ailleurs le cas depuis un moment déjà. On croise de plus des visages connus, on retrouve ça et là un ami Italien, un « danseur-fou », une multitude de personnes venues là pour la même cause: celle de son, de l’ivresse sonique, du rassemblement au son des combos conviés. Et le samedi, avec ses onze intervenants au programme, va nous en donner, de l’ivresse, en plus d’afficher complet. S’il s’achève ou presque avec la mémorable prestation des Psychotic Monks, lestes et soniques -Sonic, dirai-je même-, aux louanges nullement usurpées, révélation indé de choc, il met en scène, avant cela, des cliques dont on gardera longtemps en tête les prestations de choix. Il en va ainsi pour Bad Pelicans, au rock déchaîné, les hispanisants Big Ben Jorge ou les énormissimes Celebration Days Revue, « autrefois » connus sous le nom d’ Old Moonshine Band. Ces derniers, doués et unis, ayant totalement revisité leur répertoire pour en faire un uppercut rock, blues et autres joué avec une mainmise bluffante. Du vrai, messieurs-dames, exécuté avec passion et émotion. Le public ne s’y trompe pas, il se trémousse et acclame la troupe Isarienne avec ferveur.
Formations en phase avec l’esprit 70’s du CDF, bandes plus cuivrées (Jungle by Night) -ce qui constitue une nouveauté sacrément bien pensée-, révélations indé de haute volée (Psychotic Monks notamment); ce samedi est lui aussi sans failles. Dense et intense, il distribue du bonheur à toute heure, présente en plus des groupes déjà nommés les excellents, entre autres, T/O, dont le rock groove et cogne, ou encore Fierce Flowers et sa brise folk-bluegrass caressante. Loxic, après Gordon et sa sieste électro en ouverture, faisant danser les CDF addicts jusqu’à des heures où la nuit, excepté ici, impose son silence.
On ne le sait pas encore, on le pressent déjà pour ceux qui connaissent mais le dimanche, La Jungle va nous administrer une mornifle « technoise » de folie, signant un set bien plus que marquant. Sauvage et débridée, la paire de Mons retourne l’assistance mais avant elle, par exemple, Oliba International aura insufflé de l’Africanisme dans la place. Joe Potter, des bien connus Jouis puisqu’ils ont joué en ces lieux à plusieurs reprises, aura lui inauguré la journée avec son « soulful folk ». Qualité et diversité président au CD, elles s’acoquinent et dévoilent un registre musical solide, au sein duquel aucune faute de goût n’est décelable. On saluera pour cela le travail d’Ambre, qui gère la programmation, en plus de celui de toute la team mobilisée sur le festival. Chapeau bas jeunes gens!
Les groupes, eux, leur rendent le plus brillant des hommages. Nico Duportal, avec ses Sparks, marie blues et rock, country et gospel, de superbe manière. Sacri Monti nous propulse en terres 70’s propres au CDF, entre prog, psyché, krautrock et élans…70’s, il va de soi. Les provenances, une fois encore, sont plurielles. Ca débarque de partout et Korto, Haut-Savoyards remontés, sonnent la charge kraut-shoegaze sans débander. The Groundswell Motion y va de son psychedelic rock joliment rétro, le cadre de verdure de Cernoy brille, pour l’anniversaire des 10 ans du festival, de mille feux sonores. Il n’a pas d’égal, ce CDF; il grandit au point qu’à l’avenir, la merveilleuse forêt qui le fait étinceler pourrait s’avérer exiguë tant la demande est pressante autour de l’événement.
On n’en est pas encore là, certes. Mais en qualité, en crédibilité, en humanité synonyme de solidarité, je n’en connais pas d’aussi bon. Le CDF est une expérience salutaire, c’est aussi la garantie d’une pluie de plaisir auditif, c’est la jouissance des sens. On aimerait, cette forêt, ne plus la quitter. Il le faut pourtant; le retour à la réalité, après une telle évasion, est difficile. Mais on y revient plus fort, plus assuré, renforcé qu’on l’est par ces 3 jours inégalables, rendus possible par une équipe, je le répète, fiable en tous points et constituée d’irréductibles aux idées porteuses, avec dans sa besace, atout de poids, un carnet d’adresses décisif et une cohérence qui lui permet l’excellence.
Photos William Dumont.