L’Epée est un projet unissant Emmanuelle Seigner, les Liminanas et Anton Newcombe. On en salive déjà. Un EP intitulé Dreams est déjà sorti, faisant monter la pression quand à la sortie de l’album ici présenté. Celui-ci, au delà de l’évidente attractivité de ses auteurs, se révèle être un vrai essai groupal, cohérent, sulfureux, qui amalgame parfaitement les tendances et options musicales des artistes impliqués.
Une Lune étrange, psyché obscur, porte à la fois la touche Liminanas et la patte Newcombe tandis qu’Emmanuelle, au chant, insuffle du sensuel mutin. L’entrée en matière donne déjà matière, elle « déroule » pour ensuite laisser Lou, lancinant, 60’s façon Liminanas, confirmer que L’Epée, aussi retenue que tranchante, est ici à son avantage. Dreams, déjà entendu sur l’ep « apéritif », suinte lui un air 60’s enlevé, aux choeurs et traînées fuzz fatals. On sent une pertinence, un travail ajusté tant musicalement que dans la production, signée Newcombe lui-même, qui sert l’intérêt du projet. Chacun trouve la place qui lui revient, le disque sonne comme si depuis toujours, et ça parait logique au vu des dernières activités communes de la troupe, L’Epée devait voir le jour. La brigade des maléfices…maléfique, est alerte, bruitiste; le chant lui donne du cachet, greffé à une instrumentation « maison ».
Plus loin, On dansait avec elle dépayse un peu, se déploie avec lenteur. Ce faisant, il n’en est que plus pénétrant encore. La dualité des voix, magnifique (Newcombe use du Français, ce n’est que pure logique au vu de son appétence pour la culture hexagonale), le fait briller plus encore. A côté de cela, on a ces compositions lestes, simultanément rêveuses et puissantes (Ghost rider) qui elles aussi font sensation. On est au mitan, qualitativement parlant, de ce que peuvent faire Lionel et Marie et de ce que conçoit Anton avec son Brian Jonestown Massacre. C’est dire la teneur de Diabolique, qui avec Grande signe une énième pépite psyché à l’ornement qui « embarque ». Le climat est ombrageux, l’opus serti de sons plus que bons. Authentique, L’Epée remet en scène son psychédélisme envoûtant sur Springfield 61. Des « La la la » tous simples, l’air de rien, lui donnent du chien.
Déjà majeur, Diabolique révèle ensuite Un rituel inhabituel, leste et céleste. On s’envole, on aura du mal à redescendre mais Last picture show, dernier titre appuyé, cadencé, viendra nous tirer de notre douce-amère rêverie. Dans le même élan alerte, il validera l’excellence d’un album accompli, effort collectif valeureux au sein duquel personne ne tire la couverture à lui, s’impliquant au seul bénéfice du collectif.