Sorti quasiment au même moment que le dernier Jorge Bernstein & the Pioupioufuckers, l’album des Blousons, Biknits, s’avère être aussi significatif. Dans un genre différent mais pas moins concluant (on est ici entre rockab’ dingo, scène française rétroïde au verbe décalé, noise, post-punk et si le rendu se montre foutraque, il est avant tout de haute volée).
Les garçons n’attendent d’ailleurs pas pour défourailler; l’éponyme Biknits crache un rockab chanté dans notre langue, qui de suite caractérise le groupe. Synthés virevoltants et coups de boutoirs sonores s’acoquinent parfaitement, l’entrée en matière sent déjà bon. Dotés d’une folie qui leur permet le meilleur, Les Blousons ont trouvé leur taille ou plutôt leur bonne et due place. Chihuahua balance une trame surfy-rockab endiablée, qui se modère et repart ensuite sans calculer. Le style est accrocheur, débridé, inspiré aussi. Plus loin, Saloon fuzze et pousse les portes d’un univers belliqueux. Les Blousons jouent vite et dans le trépidant, mais ils ont l’art de poser le jeu quand il le faut. Ils ne répondent en tout cas à aucune règle si ce n’est la leur.
A mi-chemin, Chabada suit un cheminement autrefois emprunté par les Washington Dead Cats, qu’un break malin étaye. On est cependant toujours dans l’emportement, dans le dément, et tout cela sied merveilleusement à nos Blousons, crédibles dans l’option choisie.
Jamais sages donc, plutôt sauvages même -mais avec panache-, ils tirent une autre salve nourrie avec Du gasoil plein les yeux. Le tempo est une fois de plus « up », les écarts sont de mise et les sons barjots. On adhère, mémère; on est d’autant plus preneur qu’il y a ici des « accalmies » sacrément bien foutues. Et que celles-ci sont suivies, bien entendu, d’embardées wild. Kamikazé étoffe une fin d’album prenante. Il joue lui aussi la carte de l’alternance entre moments modérés et extravagance synonyme d’excellence.
Enfin, Transsibérien se place sur les bons rails: du même acabit, il met un terme à ce Biknits qui nous présente un combo largement estimable, auteur pour le coup d’un mini album solide et enthousiasmant.
Photo Estelle Chaigne