Entre autres affiches attrayantes émanant de la Lune des Pirates, certaines sont consacrées aux « vieux routards » de la scène d’ici et d’ailleurs. Au beau milieu des formations d’aujourd’hui, ça crée un équilibre, une cohérence et en ce mercredi de mai, c’était la mouvance rockab’ qui était à l’honneur avec la venue des Washington Dead Cats, présents depuis plus de 30 ans et oeuvrant à honorer, avec panache et folie, un amalgame entre rock, punk et touches rockabilly donc. Mat Firehair et ses (nouveaux) acolytes savent y faire, ils l’ont bien évidemment démontré mais notons avant cela la remarquable prestation des Crappy Coyotes, combo « du coin » dépositaire d’un répertoire ancré dans le passé, bien assis entre compositions endiablées et reprises de choix.
En quatuor serré et sous l’impulsion, par exemple, de la guitare incendiaire de Manu Héreau, le groupe fait valoir un savoir-faire que le chant de Sophie Lefort, enflammé, réhausse d’un cran supplémentaire. Ces quatre-là avancent à la passion, honorent E.L. Allen ou encore W.Scott, mettent de la vie dans leur jeu et, plus loin, reprennent aussi les Stray Cats. Rockab, rock et ardent, vous dis-je. La contrebasse de Fred Kwiek amène du groove, derrière ce bazar qualitatif à souhait le nouveau venu Jocelyn Soler charpente la baraque comme il se doit. Crappy Coyotes, à l’évidence, fait dans l’excellence. Fer de lance d’un vivier régional riche, il prouve que le vécu permet de réaliser des choses accomplies. Quelques poses traduisant le plaisir de jouer et la sincérité des musiciens pimentent le set, que pas un seul temps faible ne viendra entacher.
Probant donc, le live des Crappy Coyotes m’aura de plus donné l’envie de réécouter leur bien nommé Let’s get wild. Wild, les Washington Dead Cats le seront, avec dans leur sac une enfilade conséquente de morceaux solidifiés par l’expérience scénique autant qu’un parcours discographique de taille. Leur énergie me replonge dans l’époque où, ado loin d’être adulte, je découvrais leur son, pour moi frais et sans détours. Go vegetables go! Les cuivres apportent, de surcroît, une coloration appréciable. Et loin d’être figée puisque surf, rock’n’roll ou encore garage punk sot de la partie. Nous sommes nombreux ce soir, en « vieux passionnés », à profiter de l’occasion. Certains viennent de Seine Maritime, pour rien au monde ils seraient passés à côté de l’événement. A côté des anciens, des plus jeunes s’en donnent aussi à coeur-joie. L’intensité ne retombe pas, Mat nous gratifie d’une gestuelle folle et expressive. Derrière, ça ferraille sec. On a ce qu’on est venus chercher: un flux rock/rockab’ émaillé de refrains qu’on reprend, servi par une pleine brouette de titres forts.
Le gig du soir met à l’honneur une scène dont on ne parle que trop peu, alternative, foisonnante, explosive et insoumise, ainsi qu’ un groupe qui en constitue l’une des répliques les plus fidèles et durables. Remercions donc la « Lune » pour cette date qui aura de façon certaine contenté son monde, en plus de mettre l’accent sur une programmation ouverte et éclectique, dans le refus de se restreindre au « tout actuel ».
Photos William Dumont.