Déjà chroniqué en ce zine, le trio Lyonnais Poil avait déjà récemment remis le couvert avec un split l’unissant à Mula, Colombiens aussi barrés que lui.
Cette fois, c’est en son nom unique qu’il récidive, dans une étrangeté à nouveau affirmée et revendiquée. Laquelle lui permet d’asseoir son identité, forte, loufoque, à base de sons dingos et de chants hallucinés. Sus, c’est le nom du disque ainsi conçu, se découpant en 2 faces (Face A appelée Luseta, incluant 3 morceaux/face B porteuse de 2 titres et répondant au nom de Lou Libre de l’amour). Deux faces, donc, qui ne le voient jamais perdre la face, armé qu’il est de ses fulgurances tour à tour noise, jazzy, Zappaesques dans leur bizarrerie, qui dès Sus la peira, premier des cinq morceaux offerts, se mettent en évidence. On est dans la stridence noise, chaotique et pourtant cohérente. Poil fait feu de tout instrument, son panel est « classique » mais fait un raffut jouissif. La voix amène une respiration et, dans le même temps, redonne du souffle à la folie sonore des Rhodaniens.
Avec Lo potz, les chants sont presque religieux. La plage est tribale, gronde avant de complètement imploser en se liant à Luses fadas, ultime chanson de la première face. On groove, ici, dans la démence synonyme d’excellence. Bien que folichon, le tableau est extrêmement musical. Des parties de claviers entêtantes participent à la fête, changeante dans ses orientations sans que cela lui nuise le moins du monde. On pense entre autres à Primus pour l’amalgame stylistique, le côté barré, soniquement et vocalement, de l’effort.
On attaque alors la face B, avec les secousses de Greu martire. On se fait bouger, les organes vocaux délirent à nouveau et c’est, dans le rendu, à nouveau unique. Pertinent dans son enchaînement de morceaux qu’on n’arrivera pas à choper au lasso, Sus distingue évidemment ses auteurs. Qui, avec Chin fòu, abordent des territoires psyché et célestes (les chants) avant d’installer des ruades noise brèves, percutantes. Ce Sus ne trouvera pas d’équivalent, ça ne le rendra que plus précieux encore dès lors qu’on l’aura, à force d’écoutes immersives, plus ou moins « dompté.