Tiens, ce duo est rennais. Premier bon point pour ces Malade[s] créateurs d’un univers captivant, à base d’électro dépaysante, animée, spontanée, ornée par une clarinette (celle de Louise Goupil), l’élément féminin d’une paire s’étant rencontrée il y a déjà 10 ans), et vivifiée par l’ornement de Tanguy Moaligou, son acolyte et parfait complément, ici, sur le plan musical. Le tout de manière aventureuse, dépaysante et inventive au point qu’à l’issue, on n’en ressortira pas sans dommages…positifs pour la santé mentale, à la fois malmenée et transcendée.
Car Malade[s], pluriel dans ses activités, large dans sa vision, a d’ores et déjà réussi à créer un univers. Lequel, me direz-vous? Le sien! Et ce Toute chose invisible à la fois trip-hop, rock acéré mâtiné de techno (Struggle, excellent), unique et sans plan par trop défini à l’avance, transporte. Pour cela, il n’attend pas. Son Toute chose visible qui donne son nom à l’essai, premier morceau d’un album de six titres voyageurs, nous fait quitter nos bases et notre zone de confort. Ses voix samplées amènent un côté cinématographique qui se couple joliment au trip généré par la musique. Endless nights suit, Malade[s] n’en est pas à son premier essai et déjà, il subjugue. Le morceau, lui aussi, nous emmène dans un ailleurs. Trip-hop, jazzy, il souligne la parfaite alchimie entre les deux membres de la paire, passionnante.
Si la rondelle s’intitule Toute chose visible, Malade[s] nous guide avant toute chose vers du jamais vu. Du jamais entendu aussi, comme l’est ce Sur ce chemin noir à la pulsation électro qui nous embarque. Le disque, à la prise de risques qu’on saluera, trouvera peu d’équivalents. Vivant et trépidant, il constitue une trouvaille sans failles. Rude et raffiné, il permet, aussi, de fuir une réalité que seul le son, parfois, souvent, peut atténuer. Hibou, qui narre un drame ayant réveillé des blessures liées à la disparition de proches, assied de façon rédhibitoire le style de ces Malade[s] loin d’être fades.
Plus loin, le Struggle précédemment décrit étaye le rendu avec brio. On est de toute façon déjà prisonnier, déjà pris dans le périple expérimental de ces Malade[s] à la santé mentale ici très porteuse. Bang!, dernier effort d’un objet fort et évocateur, livrant une ultime transcendance sensorielle sans retour garanti, qui nous fera décoller, tutoyer les cieux et fermer les yeux, au terme d’un album magistral.