Trio bruxellois de « doom cinématique », Von Stroheim a déjà et jusqu’alors sorti un EP et réalisé un ciné-concert. Ce qui, au vu de sa capacité à créer sur ce Love? Who gets love? des climats saisissants, lestes, soulignés par du sample, des instruments inédits dont le theremin et un chant féminin possédé, n’étonne guère.
L’album, en effet, se démarque et captive par son côté « post », brut et beau, hors-genres. Moth, planant et pesant, dépayse et plante de suite un décor passionnant. Chant aigu puis plus grave, sonorités haut perchées, paysages sonores puissants et avenants; tout y est, Von Stroheim prouve sans attendre qu’il détient les clés d’un univers singulier. For a beautiful girl avance au ralenti, doom et atmosphérique, fort et céleste. L’amalgame Von Stroheim s’écoute, se vit, plus qu’il ne se décrit. Pulp expire ce même doom plein de classe, sans complaisance malvenue mais extrêmement beau et, dans le même temps, contemplatif. Inspiré du cinéma des années 40 et 50, le groupe surprend. Par la répétition, le ressac d’ambiances denses, il atteint les cimes. Et nous avec.
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Les riffs maousses de Split font des ravages, la voix les accompagne avec un coffre certain. Les groupes belges sont souvent bons et Von Stroheim ne fera pas exception. Il agresse intelligemment, se modère avec adresse. Huit titres lui suffisent ici à imposer un style imaginatif. Qu’il opte pour le climatique aux effluves jazzy déviantes (Cigarette smoke, superbement orné), fasse le choix d’une trame douce que le chant de Dominique Van Cappellen-Waldock colore et assombrit à la fois, à l’instar des samples utilisés (Wire), il brille dans sa noirceur.
Avec Red raw, on plonge dans des sphères agitées, subtiles aussi; les guitares arrachent tout, la cadence est folle, le chant habité. Derrière, le theremin borde la chanson en l’élevant très haut. Von Stroheim n’a pas son pareil pour faire dans le personnel. Blood institute est songeur, aérien, mais se pare de sons troublants. On ne fait pas dans la norme, c’est aussi ça qui plaira. On agresse et on caresse, de manière conjuguée et/ou « séparée », avec à chaque fois un impact marqué. Pour, à l’issue, enfanter un disque aussi nuancé que frontal, aux essais exigeants et accomplis.