Issu de l’Ile de la Réunion, Pamplemousse avait déjà juté avec un premier album abrasif et éponyme, en 2017, sorti chez les décalés et indispensables A Tant Rêver du Roi. Garage, noise et blues y copulaient allègrement et pour les besoins de ce second opus, le trio investit le Black Box à Angers et s’adjoint les services de Peter Deimel (Shellac, Chokebore..). High Strung, ledit disque, est ainsi d’emblée complètement wild, le morceau-titre donnant sa pleine mesure noise/rock’n’roll. Sans plus attendre, Pamplemousse cogne sans complaisance et se hisse à un niveau élevé. Les titres sont de plus courts et efficients, la noise de Dragon’s breath voit les Réunionnais s’imposer sur un tempo plus leste, au notes bluesy perverties. Le chant braille, en corrélation avec un contenu tout aussi colérique et incoercible. L’écorce est rude, le Pamplemousse juteux et bourré de vitamines noise. On a de plus, ici, l’idée de varier les cadences avec intelligence.
Le rendu, en effet, est pensé en dépit de ses atours directs. Losing control installe un garage compact, où basse lourde et guitares jouissives discourent avec une batterie implacable. Pour tout amateur de rock aux crocs acérés, High strung est une pépite. Porcelain, noise et lourd, est pénétrant. On ne s’étonnera guère de l’excellence du travail, l’écurie ATRDR réservant régulièrement à ses avisés des sorties de tout premier ordre, et on l’écoutera fort, bien fort, de manière répétée.
Quelques notes plus loin, Space out se fait lui plus « psyché » mais dans le sonique, on s’en doutera. Pamplemousse ne s’en tient pas à une seule et même direction et cela n’abîme en rien sa pertinence. Heebie Jeebies lâche la bride, sa cadence est effrénée. On joue vite et fort mais on breake comme il faut. Les chansons tracent mais respirent, l’album est conçu avec ingéniosité. Back in L.A., splendidement blues, instaure ensuite sa classe vénéneuse. Il faut le dire; il est rare de jouir, actuellement, d’albums aussi bien trempés. Et qui, de surcroît, retranscrivent fidèlement l’impact live de leurs auteurs.
Ventoline nous laissera à peine respirer, fort de sa furie garage. Les sonorités ne sont pas celles que la radio mettra dans son escarcelle. On est dans le rouge niveau intensité, et on sait incruster des mélodies, qui se voient prises dans le tir tendu du groupe (Top of the bill). Noise mais ouvert, les écoutilles non restreintes, Pamplemousse laisse derrière lui un disque magistral. Et le termine au son de son Hot fudge Monday, alerte, découpé dans un rock qui, tiens, pour le coup, m’évoque les mecs de Foil, groupe des années 90 à l’impact indie marquant. Enorme!
Photo Matthieu BASTIN