Tout amateur de rock de rock disjoncté se souviendra des débuts discographiques de Royal Trux , fabuleux duo unissant Jennifer Herema et Neil Hagerty, en 1988. Dans la foulée de ce premier jet déjà génialement foutraque, d’autres albums suivront avant une séparation en 2000. 15 ans passent, la paire réinvestit les planches en 2015 et nous voilà, comble du bonheur et de la déviance sonore, avec ce nouvel opus appelé White stuff.
Ne nous méprenons pas, l’ordre n’est toujours pas de mise; il s’agit là d’un fatras jouissif, qui démarre sur un rock lo-fi aux mélodies bourrues et tordues (le titre éponyme). Royal Trux est intact, fort de ses excès et d’un esprit libre qui contourne les formats prédéfinis. Year of the dog, tout aussi rock et crade -ça tombe bien, Neil et Jennifer sont à leur affaire dans ce registre-, alliant les voix pour confirmer l’excellence du rendu. Celui-ci est minimal, de haut niveau, malpoli et dépoli. Purple audacity #2 se fait lui bluesy-psyché, sur un rythme plus indolent. Il a chez Royal Trux une sorte de sensualité boueuse, des sons vicelards, une approche, en fait, très personnelle. Suburban junkie lady, créé dans le même esprit lo-fi revendiqué, avec, toujours, la dualité de chants complémentaires, puis un Shoes and tags aux riffs secs, dont la formule évoque les Kills, achevant de faire de ce retour une réussite incontestable.
Les sons crissent, le contenu est débraillé et vaporeux. Get used to this convoque électro et phrasé hip-hop, on jongle avec les genres et on est loin, bien loin d’échouer dans la démarche. Sic em slow vire funky, on reste dans le rock aussi génial qu’hasardeux, aventureux. Il s’écoute fort, à l’image de l’appuyé Every day swan qui s’ajoute à la liste des morceaux imparables. Whopper Dave, plus lourd (dans le tempo), plaçant lui ses parties triturées, massives aussi, avec maestria.
Après tout ceci, l’enchainement de fin livre tout d’abord Purple audacity #1, psycho-sonique, qui tout en étant moins soutenu que la plupart des autres titres, étire la palette déjà sans chaines du groupe. La conclusion se faisant alors au son d’ Under ice, aux mélodies exaltantes passées au filtre lo-fi, évidemment. Royal.