Son nom est Motorama, il vient de Rostov sur le Don et s’il avoue l’influence de la cold-wave, il est parvenu depuis ses débuts à y insuffler une finesse merveilleuse, ombragée, et un feeling pop, qui la magnifient. Avec ce Many nights, il en fait la brillante démonstration, qui plus est souvent animée (No more time, l’introductif Second part et bien d’autres), en s’en tenant à une subtilité que l’organe de Vladislav Pershin, le leader, souligne avec éclat.
Ce fut l’un de mes concerts les plus significatifs, à la Lune des Pirates d’Amiens. Sur album, la « cold pop » des Russes parvient au même effet, en empilant des titres qui, s’ils se ressemblent, jouent justement sur cette ressemblance pour asseoir un style et le rendre non pas vital, modérons-nous, mais grandement précieux.
L’album est exaltant (Voice from the choir), gorgé de feeling, de ressenti. Tel un Joy Division plus « lumineux », il révèle un trio qui creuse un sillon poppy qu’il vivifie (No more time, encore, puis This night qui le suit) avec, ici, un entrain renouvelé. D’un début folk, Motorama crée un titre urgent (Bering island). Basse charnue et guitares fines, minimalisme à l’effet indélébile constituent ses ingrédients, décisifs. On ne détachera de Many nights aucun morceau plus qu’un autre. C’est un ensemble inattaquable, qu’on s’enfile sans interruption. Un album qui refuse de choisir entre finesse et obscurité, entre éclat pop et froideur cold, et arrive finalement à une parfaite imbrication de toutes ces tendances.