Actifs depuis une dizaine d’années, les Belges de Thot ont pour créneau, plutôt personnel, un amalgame intéressant entre noise, rock et post-rock. Avec Fleuve, nouvel album tumultueux, c’est donc une nouvelle copie agitée, aux chants associés attrayants (Rhône) que livre le groupe.
Sa colère s’accompagne d’élans posés (Rhein), d’intros annonçant un contenu insoumis, dans le refus des contours connus (Odra, le titre introductif). Produit par Magnus Lindberg de Cult of Luna, Fleuve entre en crue, s’apaise, impose en tout cas son flux, tantôt tendu, tantôt modéré. Il fait preuve d’une certaine élégance dans ses moments d’emportement (Vltava), plante des décors sonores apaisés qui ensuite s’emballent. Porteur d’une identité forte, Thot est exigeant dans le contenu mais méritoire dans le rendu.
Il y a dans ce disque, de plus, une recherche d’esthétisme brut, de déviance sonore à la fois belle et déjantée. Duna est de cette trempe, il dérape puis se recadre. Volga présente une amorce subtile et légèrement obscure. Samara est lui dépaysant, se pare d’effets tribaux. Avec Thot, le panel ne se restreint pas. On expérimente sans partir trop loin, l’opus demandera néanmoins une certaine capacité à l’assimilation. Le jeu en vaut la chandelle, à l’image de ce Bosphore terminal de toute beauté, à la lente montée en régime, joliment zébré d’instruments inédits.