Projet de Joseph Bertrand, poète désenchanté (quoique…) et inspiré s’étant déjà distingué avec l’excellent Bang!, Centredumonde sort avec ce Rêvons plus sombre son véritable premier album.
On y trouve des chansons lo-fi parfaitement troussées, une invitation à rêver, plus sombre certes, compte tenu de l’époque, mais sans relâche. Les chansons, au nombre de dix, sont autant de recours à l’obscur de l’ère en cours, se découpent dans des mélopées scintillantes drapées dans de l’obscur, décorées de motifs électro de choix (Si tu appartiens à la nuit). Le contenu est varié dans ses climats, la dominante est certes « grise » mais ne se restreint pas à cet unique atour. Des moments orageux teintent l’oeuvre de l’artiste au verbe juste. On pense à Swell pour ce minimalisme qu’on penserait joué devant nous (Rêvons plus sombre en ouverture), pour cette lo-fi dépouillée de tout fard et, de fait, plus vraie encore. Sous un nuage noir est lui plus chanson, des synthés discrets lui confèrent un bel ombrage que contrebalance la pureté du chant. Constellations,dans la foulée, trouve sa source dans une sorte de cold-pop subtile. Copenhague, qui suit, développe une trame bluesy lente et bourrue en son début, puis chanson ensuite avec, atout de taille, la vêture de qualité, douce-amère, concoctée par un homme délibérément opposé aux injonctions sociétales.
Sa besogne est belle, sobre, gentiment grondante aussi (Sinistre Finistère), forte de sons simples qu’on garde en tête. Noisy et vive (Danse morose), elle vaut par ses textes, onguent élégant contre le spleen. Le « bricolage » de Bertrand touche au coeur et soigne l’âme. Légèreté alerte et choeurs de plume (Les ondes gravitationnelles), chanson d’un espoir à peine altéré (Femme de militaire), ses vertus sont nombreuses et l’accroche assurée. The chappaquiddick incident vient mettre alors tranquillement fin à l’album, au doux tourment, d’un être sensible et talentueux, humain en diable.