Désormais seule, depuis Adieu l’enfance (2014) à la voix de La Féline, Agnès Gayraud sort sous ce nom son nouvel album, Triomphe. On y trouve, avec délectation, sa pop littéraire et ici riche de sens, stimulatrice de la réflexion sur soi et sur le monde, dans le mot. Et qui plus est jamais musicalement fermée.
Au contraire, des stridences et fulgurances l’ornent, lui donnent du caractère (La mer avalée, les cuivres de Le royaume). Ailleurs, fausse douceur, acidulée, et prestance vocale priment et créent l’harmonie (Triomphe). L’accroche est présente, l’univers sien et ce dès l’inaugural Senga, belle illustration musicale de nos désirs, à peine voilés, d’être en capacité d’accomplir tout ce qui fuit nos compétences. Il y a de la Vie dans ce disque, c’est même le terreau de son propos. A la fois enflammé et délicat (Samsara), il mérite une compagnie fréquente. On pense parfois, pour le décalage du contenu et la liberté de ton, à Mansfield Tya, à l’occasion par exemple de l’excellent La femme du kiosque sur l’eau.
Racé musicalement, distingué de par son verbe, il honore sa génitrice, entourée par des musiciens qui assurent de belles trames en écrin à son chant. Qu’elles soient dans la retenue, plutôt délicates bien que de caractère (Comité rouge), plus appuyées (Séparés, non moins bon que le reste), elles font mouche et regorgent de sonorités qui se démarquent. On leur prêtera attention jusqu’aux derniers instants de l’opus, entre Le plongeur, dénudé, ce Gianni nappé à l’orgue, groovy en diable, et pour finir, Nu, jeune, léger, conclusion apaisée d’une oeuvre de grande classe.