Si Rouen est actuellement toujours et bien rock, regorgeant de groupes « autres », il importe de souligner que la période 1980-1990 de la ville fut non seulement l’essor, mais aussi le développement continu d’une scène toujours plus fourmillante et qui plus est indépendante, insurgée dans l’esprit et dans le son.
En 23 titres, dont une pelletée de b-sides et d’inédits, de raretés issues de vieilles K7 ou rippées depuis les vinyls d’alors, c’est ce que s’attelle à faire ici le précieux label rouennais SMAP Records. Le recueil fleure bon une époque audacieuse, foisonnante et fourmillante, et exhale bien évidemment une qualité musicale parée d’authenticité. Entre Gilles Tandy et J-M (Un monde de moi), Les Rustics qui évoquent délicieusement un…rennais –Dominic Sonic– dans son option chant en Français et après l’instru cru de Vince F.N Denis qui lance la danse, relayé par le Wild remix d’Euthanasie des Olivensteins, on y est, déjà; le ton est direct, écorché, directement jouissif. Le connu (Dogs avec leur 26 ans sans concessions) côtoie le plus « caché » et on parvient sur l’ensemble à une belle unité, dont le trait d’union tient en une vigueur punky, une énergie rock’n’roll aux rides à peine décelables. Nouveaux riches cuivrent leur Enfin l’amour, Tweed fait dans la mélodie plus poppy mais débraillée (Fashion), Fin up’s balance un Berlin lui aussi sans détours et nous voilà au mitan de la compilation, non-exhaustive, on le comprendra, avec de bien bonnes éructations à s’envoyer d’une traite.
C’est don encore ça, Rouen; des petits labels, passionnés, qui avancent avec pour seules armes, et c’est beaucoup, leur intégrité et le refus de s’inscrire dans le mainstream. Et par conséquent, des formations dans le même ton, tel C.K.C et son 20h25 aux synthés virevoltants qui se voient secondés par des basses funky. Le rendu est excellent et vient casser avec brio la dynamique punk de ce qui le précède. Ca tombe bien, Flics joue ensuite une cold-wave de classe (Son corps gît) et s’ensuivra une nouvelle série de réalisations probantes, dont le refliting permet de sacrées découvertes.
Parmi elles et en vrac, citons Les Coolies avec Satanik, cold-punk, Tupelo soul et son saccadé, crissant Au fond du square, Nurse avec un Wild wife qui reste en tête, et un tas d’autres ritournelles qu’on jouera fort. Avant que Gilles Tandy ne vienne conclure et récidiver sur La vallée des anxieux, pop-rock mélodique de tout premier choix. C’est l’Explosion Rock, fournie et qualitative, indispensable, en parfaite « maman » de la compilation Postcard impulsée par Imperial Bedroom et s’appliquant à la scène plus récente d’une ville rouennaise où il fait décidément bon riffer et traîner ses guêtres.