A partir notamment d’un premier job en tant qu’ingé-son remplaçant, l’envie est venue à Reuben Hollebon, originaire de Norfolk, de se lancer dans son propre projet musical.
Bien lui en a pris puisqu’avec trois acolytes, il nous gratifie de ce splendide Terminal nostalgia, aussi intense qu’émotionnel et mélancolique. Il s’en dégage un pouvoir d’évocation énorme, une instrumentation fine et inquiétante, parfois, du plus bel accabit (The burr), constamment affinée, dans le même temps sauvage et enchanteresse. Grosse et superbe surprise, l’album étincèle. Haystacks et ses percus marquées, son chant finaud, son fond obscur (notons l’inclusion d’un trombone, judicieuse) le font pressentir d’emblée; c’est une oeuvre majeure que nous sert le bonhomme, un disque d’une intensité rare. Un ouvrage pur et troublé, musicalement brillant (Braced), taillé dans l’étoffe d’un folk qui ne manque jamais d’impact et, surtout, ne génère à aucun moment le décrochage.
On s’en enivre donc, Hollebon a d’ores et déjà trouvé son identité; Faces, tendu et urgent, le confirme avec éclat. Le voyage est garanti, tout en subtilité instrumentale agitée, on embarque volontiers avec ce maestro de la composition, au chant déchirant, qui avec Fields, for fields s’en tient à une trame à l’acoustique épurée, sombre, pour ensuite nous offrir ce Before the flood susurré, fort du même allant folk incoercible et du même ressenti, palpable. Entre orages sonores et accalmies élégantes en fiable, il se permet aussi de hausser le rythme, d’endiabler son registre sans en diluer la pureté (A hand), parvenant par ce biais à un véritable coup de maître. On profite pleinement de chaque titre, les plus fins (Augustus) passent aisément l’épreuve d’un premier long-jet accompli. Le fond sonore étonne par sa beauté, sa simplicité et son doux-amer qui s’emporte et tourbillonne (On & on), We’re gonna miss us (when we’re gone) achève, si besoin était, de nous convertir avec des vagues de trombone alliées au chant, remarquable. C’est l’envoûtement, il se poursuit d’ailleurs avec Come back early, touchant, à la grisaille magnifique. Puis il nous laisse groggy, dans l’addiction totale, sur les notes de Common table, court et dépouillé. Merveilleux.