Dans le cadre du Fair, générateur de soirées marquantes, la Lune des Pirates ouvrait ses portes, ce jeudi, à deux formations singulières; les caennais de Samba de la Muerte, tout d’abord, puis les deux dames de Mansfield. Tya.
C’est devant une salle peu garnie -le public a la déplorable manie de ne venir que pour « son » groupe, dédaignant des premières parties souvent excellentes- que Samba de la Muerte entame donc Colors, son inclassable opus que la scène fait vivre avec ingéniosité. Entre electro, chanson et élans world (« sono mondiale » peut-on lire en certains endroits au sujet du groupe) avec quelques pointes rock, le quatuor normand déroute en même temps qu’il captive, suivant donc un cheminement versatile dans les styles que les excellentissimes You’ll never know when I lie et The beat, entre autres, nourrissent merveilleusement. Sans ligne directrice précise, c’est peut-être préjudiciable, mais avec un sens du « collage » musical et quelques ritournelles en Français qui m’évoquent François & the Atlas Mountains, le potentiel de Samba de la Muerte est évident, n’en déplaise aux absents qui, pour le coup, ont eu tort.
On les retrouve donc -les absents- massés devant la scène pour l’apparition de Carla Pallone et Julia Lanoë. Lesquelles, fortes de leur electro obscure et poétique, de leurs ritournelles distinguées/torturées et d’un univers ni plus ni moins qu’envoûtant, cimenté par une poignée d’écarts rock et de sursauts énergiques qui tirent les deux musiciennes de leur splendide torpeur, vont littéralement subjuguer la salle. Dans un décor sobre et joliment rétro, sous des lumières ajustées en phase avec leur contenu, les nantaises, complices, font corps. Violon et machines, voix et guitares, chant habité, déviances vocales et sonores, cadences lascives ou bien plus marquées; tout ces éléments, portés par la complicité unissant le duo, hissent celui-ci à un niveau plus qu’élevé et lui permettent un concert tout bonnement mémorable. C’est céleste, lettré, imagé aussi, ça transporte, ça purge et ça emmène ailleurs, dans cet ailleurs que seule la musique offre la possibilité de tutoyer. Ce moment ne se décrit d’ailleurs pas, il se vit, pleinement, et s’inscrira parmi les meilleurs lives, en tout cas l’un des plus ensorcelants, vécus en un lieu qui pour le coup porte bien son nom.
Photos William Dumont.
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