Marrant comme un patronyme risible peut « cacher » un labeur aussi valeureux. Erwan Pinard, de son vrai nom…Erwan Pinard, se distingue en effet grandement avec cet excellent Obsolescence programmée, troisième opus vigoureux, varié et éloquent avec, en point d’orgue parmi nombre d’autres titres estimables, une moquerie géniale à l’attention de Goldman (Colère).
L’atout du bonhomme, ici en trio avec les frangins Aubernon, est d’imposer un panel qui jamais n’ennuie, à partir de ce Laisse-moi qui évoque Thiéfaine, dans un apaisement qui, vite, se pare d’élans rock. On remarque, aussi, les textes du bonhomme, solennels ou ironiques, dérisoires ou allégoriques. Comptes à rebours évoque l’amour fuyant de façon à la fois amusante et originale, sous le flux d’un rock plus tendu encore. Il démarre sacrément bien, cet album, et l’apaisement folk de J’élabore, s’il calme son entrain, renforce son attrait. Pinard signe des « lyrics » de haut niveau, digne des plus grands. Pénurie balance son amertume rock bruitiste, ses sautes d’humeur et ses embardées cuivrées. L’effort ne dévoile aucune faiblesse, renforcé qu’il est, ensuite, par Qu’as-tu été capable de faire par amour?, dénudé, qui met en avant des paroles à nouveau remarquables. Avec, rares mais précieux, des cuivres décisifs. On s’entiche d’autant plus du disque qu’il offre ensuite un reggae (Je ne sais pas dire non) notoire, aux gimmicks accrocheurs, suivi de A quoi bon et son rock funky à la fois rude et suave, au refrain singulier.
On poursuit donc volontiers l’audition et là, Tranquille se base sur le « countries dropping » pour installer sa trame cuivrée dépaysante. Le rendu est dans un premier temps posé mais animé, le chant se démarque tout autant. On apprécie l’ironie du bonhomme, son inspiration constante. Explosif sur la suite, le morceau entérine de façon incontestable la portée d’Obsolescence programmée. Effluves jazzy pour Impossible, folk racé à souhait pour Les queues de poisson, teinté d’un léger blues; tout, ici, est accompli. Et passé le fameux Colère cité plus haut, Fleur d’oranger déploie lui aussi une jolie trame chanson-folk encore une fois significative.
Puis Eau de vie nous enivre de cuivres lents, dans un optimisme adroitement enveloppé, en conclusion d’un album étonnamment attrayant.