Content (2011) avait vu Gang of Four opérer un retour estimable, à peu de choses près dans le ton d’un genre très « sien ».
Aujourd’hui, Andy Gill recrute à tout-va: Alison Mosshart des Kills sur deux morceaux, John Sterry au chant, Thomas McNiece à la basse, Jonny Finnigan à la batterie, s’entoure de quelques guests de renom (Gail Ann Dorsey, Robbie Furze des excellents The Big Pink, le guitariste Japonais Hotei…), et…sabote, quelque part, le Gang of Four d’origine tout donnant à son projet un nouvel élan simultanément salutaire et déstabilisant. Le contenu de l’album qui en résulte, What happens next, s’écarte en effet délibérément du post-punk de départ pour investir une electro-rock assez variée, ici, pour convaincre, mais aussi impersonnelle, parfois trop émotionnelle ou emphatique (The dying rays, Staubkorn). La mutation est telle que seul le nom d’Andy Gill permet à l’auditeur de se dire que c’est bel et bien Gang of Four qu’il écoute, l’entrée en matière est bonne sans plus, avec ce Where the nightingales sing de belle facture mais prévisible avec son rock teinté d’electro et de guitares massives, puis Broken talk, avec Alison, donne du coffre à ce début d’album en groovant comme il se doit et en bénéficiant bien entendu du chant canaille/sensuel de la Dame. Isle of dogs est lui aussi bon et tout aussi déroutant, on ne sait que penser d’une nouvelle mouture contestable, à laquelle on accordera toutefois du temps pour s’affirmer, se créer une identité, ou sombrer dans un oubli qui n’aurait pas grand-chose de surprenant.
Si Gang of Four était jusqu’alors inventif et reconnaissable, ayant su planter les jalons d’un style personnel, ce n’est plus le cas, ou dans une moindre mesure; il propose des titres honnêtes, oscille entre le bon et le creux et, au delà de ça, s’inscrit dans une mouvance déjà chargée. England’s in my bones illustre bien ça; probant, le morceau n’étonne cependant personne, à l’image d’un First world citizen tout aussi bon et « déjà entendu », ou de Stranded. Il y a là de bonnes idées, des sons bien pensés, une certaine vigueur, à d’autres moments des plans plus massifs ou sensibles s’incrustent, mais la mixture demeure fade…tout comme on peut l’ingurgiter à grands lampées en faisant abstraction de tout le reste. On trouvera, en fin de parcours, un Dead souls honorable, dopé par les guitares d’Hotei et à l’exact mitan du disque, il aura fallu endurer ce Obey the ghost sirupeux, le paradoxe résumant fidèlement un rendu inégal, tirant vers le bon certes, le plus souvent, mais dont on attendait plus de constance et un écart moins conséquent dans l’option musicale choisie.
L’espoir demeure toutefois, What happens next se voulant avant tout l’album d’un nouveau départ dont on espérera donc une suite moins convenue et d’avantage singulière, plus en phase avec la particularité de Gang of Four et l’esprit qui l’anime (l’animait?), ouvertement éloigné de toute autre identité musicale reconnue.