Fat Supper est rennais, « habite » chez Les disques Normal, il est donc bon. La formule est réductrice mais correspond à une réalité s’agissant de ce label et le quatuor, avec sa versatilité stylistique teintée de lo-fi et d’élans noisy, ne dérogera pas à la règle. Son Academic sausage contient en effet dix titres d’obédience rock, certes, mais qui peuvent toucher au hip-hop (le débit vocal de l’excellent et nerveux Clutter en ouverture, puis Smell et ses coups de semonce soniques, ses pulsations de basse) ou exhaler des relents folk voire jazzy (Butter bed), à d’autres instants noise, garage, pop, grunge.
La variété (des genres) est donc de mise et ne porte jamais atteinte à la qualité d’un opus impeccable, qui garde une certaine simplicité. Enregistré dans les conditions du live, l’opus a du caractère, recourt à des sons bien trouvés, groove méchamment, riffe cru et groove adroitement (Grotorro et ses relents quasi rockab). La mixture est ajustée, on prend là des directions parfois abruptes sans jamais s’y perdre et comme ses compagnons de label We Only Said, Fat Supper définit son territoire, éclaté, passionnant. Narvana allie voix mélancolique et guitares sauvages, fait dans le grunge aux variations multiples, Sandcastle est tour à tour pesant et alerte; chaque titre est aux limites du standard d’un style. Les deux chants apportent un plus indéniable. Ce même Sandcastle pratique une noise à la voix changeante, justement, et à mi-chemin des dix morceaux livrés, on ne s’ennuie pas un instant, loin de là tant le contenu captive.
Le second volet, donc, débute avec un bluesy et alerte Surrogate, qui rappelle les French Cowboy, superbement orné, avec ce je ne sais quoi de funky qui le rend dansable. Une finesse remarquable souligne Butter bed, Oddbox commence sereinement pour ensuite s’agiter en mode folie sonore. On pense, aussi, à Eels ou Beck pour le côté bricolé et à l’écoute, on confirme une opinion: la valeur n’est surtout pas à aller dénicher chez les « gros », mais bel et bien sur des structures modestes et fonctionnant à l’authenticité, au « vrai ». Gonogo, aux rythmes et humeurs aussi changeantes, bardé de sons encore une fois déments, le prouve, avant de laisser le mot de la fin à Basement (le titre, pas les géniaux libournais). Ladite chanson dynamitant une trame blues/grunge des plus saisissantes, suivant un procédé « maison », pour mettre fin à un second disque de haute qualité qu’on imagine tout aussi impactant sur les planches.