One man band de Göteborg en Suède, révélé à mes oreilles à la Lune des Pirates d’Amiens lors des Nuits de l’Alligator, Bror Gunnar Jansson, déjà, y avait effectué une prestation rugueuse et mémorable. Il y faisait tout, en termes de pratique, et cet excellent Moan snake moan réussit la prouesse de se hisser à la hauteur de ses lives, entre blues furieux (The church bell’s tone en intro, imparable) et élans à la Tom Waits (William is back, non moins bon), après qu’un blues plus « à l’ancienne », de grande classe lui aussi, se soit glissé dans le répertoire (Rattlesnake).
Ici, un saxophone drape certains morceaux, Bror Gunnar Jansson se fait épauler ça et là mais garde la plupart le contrôle d’un jeu racé et à l’arrache, mais qui ne manque pas de panache (One for earth). On oscille entre l’allant de morceaux tranchants et ces essais plus ambiancés, plus enfumés, la réussite est totale et un pesant et concluant One for earth étire l’horizon de ce Nordique doué à l’extrême en plus d’être authentique. Il marie blues feutré et bourru sur He had a knife in his hand, fait un bond dans la cadence avec Ain’t no grave (Brother Claude Ely) et fait feu de tout bois, exécutant un blues flamboyant et paraphant un album qui ne l’est pas moins. Les climats happent (New mountain ballad N°1), ses coups de sang élégants (Butch) font de Moan snake moan un classique (TV, dénudé et groovy avec son tempo effacé/insistant). La fin du disque renoue avec une trame épaisse, brute (God have mercy), le bonhomme n’échoit de toute façon jamais dans ce qu’il fait et accomplit tout avec maestria, suivant une mainmise de tous les instants, avec pour effet de bonifier ce bon vieux blues des familles. Lequel, brillamment exhumé, souligne selon plusieurs déclinaisons une oeuvre majeure.