C’est italien, c’est hébergé par Deambula Records, ça confronte shoegaze et noise (on parle d’un choc My Bloody Valentine/Swans et on n’est pas éloigné de la vérité) avec quelques bourrades bien senties (Sick transit gloria lundi), Amaury Cambuzat d’Ulan Bator y prend largement part, signe supplémentaire d’un créneau hors-normes. Autant d’atouts pour le The Marigold de Marco Campitelli, trio au talent que ce troisième opus étale de bout en bout.
Organ-grinder, par son climat grinçant et obscur, plante déjà un décor singulier et imite le combo de Michael Gira dans la répétition, toutefois moins assénée ici, des ambiances, puis on met les deux pieds en territoire shoegaze-noise avec Magmantra, tout aussi immuable et pourtant prenant à l’extrême. Le chant n’est pas encore apparu, c’est chose faite sur l’excellent Fade down to go down et là, c’est donc la voix, dreamy et shoegaze, qui s’acoquine avec une cadence encore une fois entêtée. Le procédé est parfaitement en place, ne sonne jamais forcé et Kanaval déploie un arsenal de vertus, et d’atmosphères, qui forcent à l’écoute et la rendent fructueuse. Sludge-jungle, un peu plus loin, fait…dans le sludge, percute sous l’effet de percus sauvages et de guitares épaisses, de bribes de vocaux tribaux. C’est à peu près tout, ça suffit amplement à captiver et ça s’impose non seulement par la singularité qui s’en dégage, mais aussi par l’impression d’un genre novateur, issu certes de plusieurs courants connus, non balisés, mais quasi-inconnu à l’arrivée. Third-melancolia joue avec la même efficience sur la répétition, s’inscrit dans une mouvance indéfinissable, se veut shoegaze mais fait aussi dans la noise leste, son chant conviendrait d’ailleurs au deux genres de façon simultanée.
Difficile de ne pas adhérer donc, d’autant que l’album ne concède rien à la normalité et reflète le désir de The Marigold d’inventer, de défricher tout en gardant son identité de départ. Il réussit dans son entreprise, So say we all la valide de façon rêveuse dans la voix, breake pour ensuite suivre les traces des Swans dans un crachin noise orné avec adresse et de façon ingénieuse. Le bruitisme descend d’un cran avec Disturbed, unique de par sa noirceur lancinante, puis c’est à un morceau long, proche des dix minutes, qu’il revient de conclure.
Demon leech, ladite plage, évoquant le To be kind de Gira et consorts par son fracas pesant savamment orchestré, digne des splendides intro dont nous régale l’homme au chapeau. Le tout de façon plus mélodieuse, moins incantatoire dans le chant, mais d’une façon presque égale -c’est dire si le boulot est bon- dans l’impact.
Bel effort donc, inspiré et influencé mais malgré ça personnel en diable, de The Marigold qui franchit là, incontestablement, un palier supplémentaire.