Toujours très attendu par la jeunesse picarde, précédé d’une finale de tremplin remportée dans l’après-midi par de brillants Gderws, à Abbeville, le final du Picardie Mouv avait cette année encore de quoi plaire et ratisser large…
En effet, de la garage-pop de The Buns à l’electro de Super Discount en passant par les étonnants Rodrigo Y Gabriela qui brassent allègrement jazz, pop, rock’n’roll ou encore métal dans un jeu mâtiné de flamenco, avec un détour par La Femme qu’on ne présente plus, l’affiche était belle. Diversifiée aussi, ce qui constitue à la fois un atout et un inconvénient en termes de cohérence.
Ce sont donc les deux Dames de The Buns qui allaient assurer une ouverture probante, marquante et pleine de fougue charmeuse, en mode garage mélodique ou percutant. Riffs solides, rythmique sans écarts, voix sucrées ou affirmées, le registre scénique de Molly Jin et June Cooper n’a plus à faire ses preuves. Reste cependant à l’étayer plus encore et à creuser le sillon d’un rock dont le mérite, outre sa qualité évidente, est de plaire à tout amateur « pas trop mainstream » du genre.
Mainstream, La Femme l’est sans l’être, les genres mêlés (rock, surf, electro voire yéyé) sont connus mais l’amalgame personnel et c’est toujours un plaisir de voir les biarrots jouer leurs nombreux titres forts, en mode chatoyant à la Gainsbourg ou clairement plus tranchants. Le hic étant que dans les conditions d’un Zénith évidemment vaste, le groupe perd de son impact, de sa folie. La sémillante Clémence Quelennec a beau remuer et danser, ça ne prend pas comme de coutume…
Le live reste bon, loin d’être négligeable -bel apport de Raul Colosimo à la clarinette basse-, mais La Femme ne nous « donne du plaisir », comme elle se plait à l’annoncer avant ses sets, de façon accomplie, que dans des cadres plus intimes, plus rapprochés. Ce soir, moins de communion donc, mais un concert de qualité, selon une « strange wave » toujours plaisante à souhait.
Place alors à la surprise du soir, Rodrigo Y Gabriela « from Mexico » et leur jeu urgent et dynamique, à la croisée des genres et exécuté avec maestria. Aficionados de la guitare classique (Gabriela compensant même l’absence de rythmique en frappant le corps de son instrument, ainsi savamment malmené), les deux comparses/complices saupoudrent des effluves latino diablement accrocheuses, que le « non chant » finira toutefois par rendre longuettes…sur la longueur. Une reprise convenue et dispensable du Creep de Radiohead venant couronner une prestation de grande valeur malgré ces petits écueils, acclamée de façon nourrie par le public du soir.
Lequel, pour conclure, allait devoir se « fader » un Super Discount répétitif dans le ton, cependant plus intéressant que ce que fait Etienne de Crécy, ici épaulé par deux autres bonshommes, en formule solo. Un enchaînement electro recourant à divers autres genres dont, même, du rock, qui fit se trémousser les premiers rangs et valoir quelques atouts notoires en dépit de son côté réitéré. Et une soirée de clôture finalement bonne et aboutie, événement difficilement dispensable à l’image de ce Picardie Mouv d’une belle envergure, malheureusement encore trop peu suivi en certains lieux plus « reculés »…
Photos William Dumont.