Electric soul (2012) avait vu Zenzile revenir à une trame reggae/dub habitée, Living in monochrome (2007) l’ayant amené à faire un détour là encore plus que concluant du côté d’un rock bourru et de style, parfois adroitement cuivré.
Cette fois, la clique issue de chez Yotanka lorgne vers une ville de renom, au passé, et présent, chargés d’histoire et de culture entres autres et notamment musicale: Berlin. Avec pour base et source d’inspiration le documentaire de Walther Ruttmann, « Berlin, la symphonie d’une grande ville« , dont il livre là une relecture de grande classe.
Dès lors, nul étonnement de retrouver sur le disque du même nom de splendides essais entre kraut et « kosmische musik » que les habituels cuivres du groupe décorent magnifiquement, comme par exemple sur le pièce de bravoure qu’est Der Verkehr, épopée aux confins des deux tendances. On démarre en mode kraut subtil ET alerte avec Der zug et nous voilà justement d’emblée sur les bons rails, entre basse qui mène la danse et claviers cosmiques du plus bel effet. Sans plus attendre, on comprend qu’à nouveau, Zenzile pose sa patte sur un genre qui lui tient à coeur, explore et défriche et réhabilite au final ledit style avec panache. Un petit break dub « maison » ponctue par ailleurs le morceau suivant, enchaîné en fait avec le premier et intitulé Die architektur, planant et doté d’envolées instrumentales brillantes. De brefs intermèdes relient les morceaux et l’opus parait même raconter la ville, entre sérénité et coups de semonce, en choisissant à chaque fois un thème différent signifié par les titres choisis. Tout cela captive, Die fabrik allie « sonicité » et groove obsédant en s’imposant comme une énième réussite. Cohérent, à l’image de n’importe quelle sortie signée Zenzile, Berlin est tout sauf le fruit du hasard.
Die laden et Die bourgeoisie retombent ensuite dans un format paisible (bien que le second nommé se pare d’envolées cosmiques intenses), musical en diable et on ne regrettera que très peu l’absence de chant tant l’ensemble tient la route et occupe l’espace pleinement par le biais de son groove et de ses textures. Arrive ensuite le magistral Der verkehr cité plus haut, avant que Der kindergarten ne fasse valoir une finesse décisive et une sérénité spatiale qui transporte. Tangerine Dream, Neu!, on pense comme le dit la bio qui accompagne l’album à ces formations mythiques, dont Zenzile tutoie ici très souvent l’excellence.
Plus loin, l’entêtement d’une basse délicieuse emmène Die brucke, brumeux et mordant à la fois. Il faut se rendre à l’évidence, Zenzile est performant sur tous les plans et signe dans la foulée un Die freizeit de même teneur, tout à la fois massif et céleste, d’une unité confondante. Les penchants dub de Der tanz, non moins stylé et cosmique ou plutôt « kosmisch », mettant ensuite un terme à une merveilleuse épopée, hommage moderne à une musique datée mais encore magiquement d’actualité.