BachibouSouk, ce nom…
Incitation à la bonne humeur collective façon festif largement éprouvé, paroles allant de pair avec une contestation tout aussi datée (mais qu’il importe de maintenir en ces temps difficiles), registre cuivré caractéristique de la mouvance, tenues « bab » genre on s’fout d’tout. Le moins qu’on puisse dire est que le pedigree du groupe n’incite pas, quand on aime le rock, le vrai, et la singularité, à prolonger l’écoute, ni même à enfourner l’album, enregistré en live -c’est là une bonne chose, intitulé Les Pieds sur scène, dans son lecteur.
Détrompons-nous, il y a là de la « bonne came » et une musicalité qui honore les isariens, dont l’opus, après deux albums studio, a été capté en trois endroits de chaque département de la région, dont l’Ouvre-Boite de Beauvais qui a largement accompagné le groupe sur ce projet. Le résultat est intéressant, sincère et plutôt vigoureux, les cuivres soulignent une dynamique porteuse et le quatuor malaxe les genres avec succès, quand bien même il n’invente strictement rien, et fait preuve d’une dextérité verbale qui lui permet de s’extirper, un peu, de ce créneau chargé et sans saveur, jonché de groupes « fondateurs » et d’émules pas plus surprenants. On s’y laisse quand même prendre, on s’en imprégnera d’autant plus si on aime le genre et Bachibousouk a le mérite d’instaurer un carnet de scène rythmé, une belle reprise d’I got a woman de Ray Charles, vigoureuse, à laquelle succède un Fesse de bouc rock’n’roll bourru salvateur, qui voit cuivres et riffs nerveux s’acoquiner pour un bon rendu. Introspection meurtrière d’un sentiment confirmant la vigueur du tout, après une amorce tenant en un Les pieds sur scène qu’un sax volubile anime adroitement.
Il y a donc là de vrais arguments, ska, reggae, swing, zouk, rock et insoumission bien mise en son permettent un bon amalgame, Bouffon du peuple entérine la cohérence de la démarche de ces auto-prétendus « nomades » et « vagabonds » sans réelle étiquette.
A l’écoute, on pourrait le croire en effet mais il importe que Rodrigo et consorts insufflent à leur mixture épicée un tantinet d’originalité supplémentaire, histoire de se décaler plus clairement encore. La scène en tout cas leur va bien, ils font visiblement mouche auprès d’un public friand de leur univers. Fort de refrains qu’on reprend facilement à tue-tête, pertinent dans ses changements de cadence (Comme des cons) et de coloration musicale, Bachibousouk dénonce certes de façon prévisible mais ça fait du bien, en certaines occasions, de mettre en exergue les travers d’une société qui dévie de façon alarmante. Le public communie, on l’invite à feindre le bonheur, ça aussi c’est largement attendu mais ça fait partie du jeu et ça permet d’évacuer. Tant mieux donc, beaucoup y trouveront leur compte et Le bordel s’ajoute à une série de morceaux boostés par l’énergie du live, convaincants quand ils ne baissent pas la garde. On s’casse, apaisé mais doté d’un sax décisif, encore, presque free (on préférera justement le groupe dans son option débridée, plus ouvertement déviante), concluant un live qui, à l’arrivée, ne démérite pas mais donne une impression de déjà entendu et génère l’impression que les Picards gagneraient à singulariser plus encore leur univers. Sentiment d’autant plus tenace qu’ à la vue de leurs potentialités, ils en sont visiblement capables.