Vingt-cinq ans d’existence, huit albums au compteur dont celui-ci, le percutant L’épreuve du contraire, des lives non-moins impactants et la création de sa structure « perso » de booking, Sriracha. Le moins qu’on puisse dire est que Lofofora et sa fusion rock-métal aux relents hardcore date, mais il date sans s’oxyder et sa force de frappe demeure inchangée sur l’opus en question, qui d’entrée de jeu sonne la charge et balourde deux brûlots furieux et compacts: L’innocence, en ouverture, et le ramassé Pornolitique, doté d’un joli solo de gratte, qui le suit sans jamais fléchir.
Le ton est donc donné, la protestation braillarde est bien entendu à l’honneur et « Lofo » a la bonne idée de calmer le jeu (l’amorce de Contre les murs) pour ensuite revenir à son propos de prédilection, dur et frontal, chargé en guitares massives et impulsé par une rythmique implacable. Alors oui, le discours ne varie que peu, mais le groupe est de ceux qui, ayant défini ses propres contours, perdrait à les modifier sur la profondeur. Et quand bien même Reuno et ses hommes de main nous servent la même tambouille, ou presque, depuis leurs débuts et ce premier jet éponyme, on headbange dès les premiers accords et la tension demeure tandis que la qualité, elle, persiste.
C’est donc le cas ici, Trompe la mort riffe sévèrement, instaure un tempo à la fois vif et plombé, un groove méchant anime Le malheur des autres et la rondelle s’avère être une réussite de tous les instants, aussi directe que plus louvoyante comme sur ledit morceau. On y trouve des essais courts et rentre-dedans, d’obédience punk-rock (le pulsionnel Romance), des atmosphères plus mesurées mais au fond menaçant (La dérive), un mid-tempo qui étend le champ d’action du groupe (Pyromane) sans perdre en valeur. Variété aidant, on ne se lasse pas, on ne s’égare pas non plus, le tout restant pertinent. On renoue alors avec plaisir avec des plages qui tracent puis breakent pour mieux repartir (Karmasutra), La tsarine en remet une couche niveau punk-rock fonceur. Pas le temps de bailler, Double A insuffle de la mélodie -bien vu-, Chanson d’amour lorgne du côté de la première période du groupe en fusionnant brièvement et Lofofora s’y entend en refrains que les fans -et les autres- reprendront à tue-tête lors de ses lives incandescents .
Enfin, subtilité et noirceur sonore voisinent sur Transmission, le leste Notre terre et ses soudaines sautes d’humeur rythmiques, auxquelles succèdent des sons fins, apportant le dernier coup de pinceau à un tableau complet et sans écarts, digne des aptitudes de ses créateurs.