Amateur de productions hors-genres, Dora Dorovitch privilégie un hip-hop fusionné avec des genres autres, mais pas bêtement fusion comme peuvent l’être, depuis les late 90’s, bon nombre de formations méritoires mais devenues, depuis, prévisibles. Le label de Francisco Esteves met en effet en avant un « alt rap » qui se marie ici, dans le cas de Moodie Black, à une noise lente, noire, qui associée aux rythmes et vocaux rap crée un style à part.
Nausea, l’album qui en résulte, est en effet sombre et grinçant, drapé de climats angoissants générés par des morceaux singuliers. Le rendu est exigeant, l’innovation qui en découle demande un temps d’assimilation mais à l’image des autres sorties « made in Dora », l’écoute se répétera tant les ambiances vous happent et incitent à la « replongée ». On ne déplorera que la présence d’un seul et unique titre alerte, l’excellent White buffalo -le recours récurrent à des penchants délibérément lestes dans le tempo peut irriter-, mais l’opus possède suffisamment de corps et d’atmosphères (le nuageux et crissant SKIES, les basses entêtantes de Linen funerals, les guitares triturées aux relents noisy ou shoegaze qui déchirent les morceaux…) pour qu’on prolonge l’expérience. Dérangé, plombé, porteur de belles mélopées elles aussi tourmentées (The mass ou encore WOLVES), il honore le label, son géniteur, et extirpe le hip-hop de ses carcans habituels, tant vocalement que musicalement.
Ouvert d’esprit, il n’en est donc que plus méritoire encore, obsédant dans la superposition de ses sons (Death in LA, pt.1), et détient en outre la capacité à fédérer les publics.