A la « Lune », on aime la déjante -j’entends par là la déjante qualitative- et en ce sens, nous fûmes repus, ce mercredi de la mi-mai, avec le trio hirsute Cheveu, « made in Born Bad« , et avant lui, les excellents Belges de New Bleeders.
Ces derniers, superbe révélation, confirmant leur prestation de la veille, aux Bruits de Lune, en la réhaussant d’un cran supplémentaire. Entre The Ex pour le groove rude, Fugazi pour l’impulsivité et des penchants lestes bardés de riffs secs, les mecs du Plat Pays, emmenés par un chanteur possédé qu’on retrouvera à plusieurs reprises dans le public, puis à bout de souffle, ont en effet et d’entrée de jeu dynamité et dynamisé la soirée. Titres forts aidant (l’excellentissime Ox blood, Words to the wise, par exemple…), rage et sauvage maîtrise également, voilà une claque dont on redemande. Et, cela va sans dire, une première partie d’une qualité inespérée.
Cheveu
Qualité qu’on retrouvera avec Cheveu, au répertoire aussi barré que percutant, qui entre humour et auto-dérision, étayage subtil et jeu rentre-dedans, va vite rafler la mise. Inventeurs d’un genre nouveau, la clique de David Lemoine et sa pléthore de titres de folie (Charlie Sheen, pour n’en citer qu’un), sa mixture entre indus, garage et no-wave, ses clins d’oeil aussi fous que géniaux (Stadium) font de chaque concert un moment taré et mélodieux à la fois, aux nombreux sons malins qui assurent un ornement chatoyant que les grattes d’Etienne Nicolas balafrent régulièrement. Aidées en cela par les nappes d’Olivier Demeaux, sans omettre bien entendu le chant siphonné d’Etienne.
C’est dit, Cheveu n’a pas son pareil, que ce soit dans le procédé comme dans l’impact scénique. Avec modestie et avec, surtout, un savoir-faire unique, les bordelais d’origine se sont offert le luxe d’emballer le public amienois, à nouveau « douché » et forcément réjoui de ce concert de nature à laisser des traces bienfaisantes.
Photos William Dumont.