Amienois, Sleeping Village Orchestra compte en ses rangs des musiciens aguerris et s’est récemment fendu d’une superbe prestation dans l’obscure, donc seyante, et incontournable Briqueterie amienoise.
Le rendu est enfin ici restitué, à l’aide de bandes analogiques des 70’s et dans les conditions du live donc, ce qui permet un rendu fidèle à l’esprit du groupe, et, au delà de ce constat, offre un contenu envoûtant, racé.
Si on n’y trouve pas, la « faute » à un temps d’enregistrement étendu, les nouveaux morceaux et arrangements, les neuf perles de rock bluesy lancinant, underground, qui le jalonnent en font un ouvrage d’une part singulier et d’autre part, un essai psyché subtil. Heaven is not good ouvre le bal, déploie ses ombres et laisse filtrer un rai de lumière, ceci de façon lancinante mais marquée. Dès lors, on entre de plein pied ans l’univers de la formation amienoise et on se régale de ce The last meal on earth savoureux, sobre et aussi stylé que minimal. Ecarté de toute convention « dénaturante », SVO joue ce qui lui tient à coeur et fait preuve d’unité. Cohérent, sans fausse note, le tout s’écoute d’une traite et il s’avère inconcevable d’en extraire tel ou tel titre tellement chacun de ceux joués pour l’occasion, comme Killing road et ses motifs sonores simples et, dans le même temps, décisifs, s’enchaînent avec le plus grand naturel. Créateurs de climats prenants, les membres du groupe peuvent aussi faire dans l’aérien sans y perdre de leur sombre impact, allégorique (Le mendiant) pour ensuite décoller quelque peu. Le propos est beau, une basse rondelette mène la danse sur Order, le tempo s’enhardit, si on peut dire, la classe distinguée d’un Nick Cave n’est pas loin et on se dit à l’écoute qu’il est réellement dommage que ces groupes-là -ceux à la personnalité assise, armés d’une originalité salvatrice-, trop peu connus, aient tant de mal à s’extirper de l’anonymat.
En outre, le disque est d’une durée idéale pour rester intéressant et ne pas verser dans la redite. Doté d’un cachet affirmé, il instaure des chants habités, un développement tranquille mais marqué (Bufo marinus), et fait mouche sans coup férir. Sa fin, entre le blues finaud de Wendigo’s complaint et un Animals plus cadencé et « offensif », enfonce alors définitivement le clou d’un territoire musical propre à Sleeping Village Orchestra, possédé et pétri de style à l’image de ce disque rouge-bordeaux de toute beauté.