Signataire d’un concert de haute volée, récemment, à l’Ouvre-Boite de Beauvais, Fauve ne s’arrête pas à cette simple prestance scénique. Parallèlement à cela, il parait créer un style personnel, basé sur une démarche elle aussi singulière (discrétion, flou sur l’image renvoyée et instauration d’un collectif à géométrie variable basé sur l’humain). Blizzard, l’EP six titres présenté en ces lignes, illustre magnifiquement l’esprit du groupe, entre verbe remarquable greffé à un spoken word lui aussi captivant et utilisation de la langue de Molière. Le tout sous couvert de rythmes hip-hop ou electro alliés à une instrumentation pop-rock de toute beauté.
Ca démarre par l’acide et lucide Blizzard, complainte alerte et offensive, mais empreinte d’un indélébile espoir, contre les épreuves du quotidien. Voix samplée magnifique, méditations…à méditer sur l’existence inaugurent le morceau, déjà imparable, aussi beau que révolté, aussi brut que pur. Force est de constater que Fauve, à l’alchimie avérée, nous le transmet, cet optimisme indécrottable, et nous embarque dans un voyage musical, physique et sensoriel au bout duquel on entreverrait presque le bout du tunnel moral et affectif. De superbes choeurs ornent ledit titre et Cock music smart music/rag #1, vif, au texte une fois encore merveilleux, imagé, porteur d’une belle espérance, distingue à son tour Fauve. Blizzard est de ces disques qui, par l’esprit véhiculé et leur contenu irréprochable, parviennent à amoindrir le Blizzard, cette tourmente dont on a parfois bien du mal à s’extraire . On pense à feu Diabologum en moins brut mais tout aussi « pensé » et disons-le sans détours: depuis l’avènement des toulousains, dans nos bénies 90’s, rarement la qualité du groupe des Michel Cloup et autres Arnaud Michniak avait été à ce point tutoyée.
En outre, une élégance musicale certaine (Nuits fauves) honore le collectif, inventif jusque dans ses incursions samplées (le court échange de ce même titre), qui livre ensuite le plus que marquant Haut les choeurs, nouveau manifeste brillant sur les rapports humains et amoureux, au refrain mémorable. L’EP se vit autant qu’il se danse et se braille -j’en veux pour preuve la réaction du public isarien, qui, concerné, connait déjà les paroles par coeur ou presque-, présente ensuite Kané, aux choeurs célestes, au ressenti presque palpable, et prend fin sur l’apaisé Rub a dub, auto-ironique, qui tranche joliment avec l’allant des morceaux précédents et prolonge la pensée, profonde et criante de vérité, d’un parolier au talent conséquent et en parfaite symbiose avec ses partenaires du collectif.
Superbe sortie donc, d’une formation pour l’heure précieuse, à l’approche originale, dont on attend d’ores et déjà impatiemment les prochains travaux et tranches d’espoir. Et la confirmation, dans le même élan, de ses indéniables aptitudes ainsi que de la validité de son procédé artistique.