D’emblée, la jeunesse des Rollin’ Bunkers et l’allant qui en découle, leurs compos aussi pensées que speedées, entre garage, écarts surf, yéyé réactualisé et punk-rock ayant le bon goût d’éviter le direct à outrance, produit l’impression, récurrente, d’un potentiel conséquent et d’ores et déjà exprimé de façon pleine. Les titres, courts et vifs mais structurés, s’enchainent et convainquent, le trio manie l’humour avec panache et tient largement sa place en ouverture de deux « gros », pour à l’issue de leur set se révéler comme une formation au devenir à prendre en compte. On en ressort presque bluffé et on s’en remet à peine que K-Holes, sulfureux, massif et incoercible, poisseux et déjanté, nous balance un son gras et pourtant cohérent, giflé par les interventions de leur saxophoniste et ponctué par les pauses d’une chanteuse et d’une bassiste remarquables, à l’instar d’un chanteur/guitariste dont la dégaine et les attitudes évoquent Jon Spencer. C’est « juste énorme », déviant sans s’égarer, et de passages psyché en tempêtes garage lestes ou plus alertes, c’est bel et bien une gifle que l’on prend à l’écoute et à la vue de ce set tranchant, qui fait monter la tension d’un cran avant l’apparition de Ty Segall, génie prolifique du rock « garage/psyché:Lo-fi » américain.
K-Holes
De coups de semonce sans temps morts en incursions éparses largement plus mélodiques, que suivent parfois des accélérations renversantes, le quatuor à la batteuse aussi survoltée que ses compagnons de scène dévaste en effet la « Lune », qu’on imagine, frêle et précieuse, vaciller sans chuter sous les coups de boutoir de ce semblable de Jay Reatard dans le ton, délirant et immanquablement tubesque, doté de mélodies fières qui paraissent tenir debout comme par miracle au beau milieu des assauts qui lui sont administrés. Aussi strident qu’avenant lorsque le ton se fait plus léger, digne de la vague du même genre qui honora les 90’s, Ty Segall ponctue de sa furie libératrice cette première huitaine de Picardie Mouv. Et donne des galons supplémentaires à l’édition de cet automne, pendant que dans le même temps et à pas plus de vingt kilomètres des murs Lunaires, Didier Wampas se distingue de façon non moins prononcée avec à ses côtés les excellents et expérimentés Bikini Machine.
Claque amplement profitable, donc, que cette triplette sauvage et de haut niveau, d’un apport de taille dans le « menu » du Picardie Mouv.
Photos William Dumont.