Avant cela, nous avons eu droit à un happy hour musicalisé avec brio par Bill Moray & Bill puis Brooke Sharkey, dans un registre « folky/psyché » déjà bien troussé, délocalisé dans un Antidote Café ayant pour l’occasion fait le plein.
De bon augure, ces deux prestations ont précédé celle des Doigts cassés, plutôt jazzy, dans le hall du superbe auditorium Henri Dutilleux, qu’accompagnaient les bien belles réalisations picturales, ou de dessin, des Auteurs Mondialement Inconnus qui, eux, gagneraient justement…à être connus. Ceci avant l’impro inspirée et parfois hilarante des Flibustiers de l’Imaginaire, bande théâtrale entre absurde et imaginaire, à la croisée donc du théâtre et du musical, dans l’ interaction avec le public du soir. Lequel y a de toute évidence trouvé son compte et son lot de fous rires. Mission accomplie, donc, pour cet ensemble à la belle maitrise doublée d’un certain instinct.
Passé ce très bon « apéritif », l’étincelante Nadéah, charmante et magistrale, désarmante de naturel et de talent, a complètement envoûté l’assistance en usant d’une palette musicale étendue et constamment maitrisée, douée de caractère, aussi bonne dans ses élans doux que lorsque la dame montre les crocs. Epaulée avec précision et discrétion par ses acolytes, surprenante du point de vue de l’échange avec le foule, la néo-française nous a, ni plus ni moins, servi un set splendide, fait de charme et de vertus musicales plus que solides, sensibles et subtiles, finement mises en place. Le tout agrémenté de pauses et de mouvements qu’on gardera en tête, et d’interventions humoristiques du plus bel effet, en Français bien sur.
Soap & Skin
Le temps de se remettre de ce concert choc, Ek_Sistere et sa troupe d’artistes bigarrés, entre musique et théâtre, classe et loufoquerie, s’est à son tour mis en évidence et a eu pour effet de crédibiliser plus encore ce Festiv’art, qui allait connaitre une fin intense et émotionnelle avec Soap & Skin. Laquelle, aidée sur certains morceaux de sa soeur, nichée dans la pénombre, est parvenue à égaler le niveau de Nadéah en termes d’impact, selon un répertoire plus dénudé mais, sur deux ou trois compositions, indus, férocement indus même, tels de grands coups de semonce au beau milieu de sonorités bien plus délicates. De spleen, de tourment et de désarroi magnifiquement mis en son s’abreuve en effet le set, prenant, à couper le souffle ou à rester coi, de cette magnifique Dame.
D’un dernier opus marqué par le départ de son père, Anja, touchante, crée un univers sombre et pur, serein et perturbé, entre piano avenant et déviances indus brutales aux guitares massives et déchirées, le tout magnifié par sa son superbe organe vocal. Le moment est intense, captivant; des fleurs seront même distribuées au public en sa fin, de même qu’à cette femme dont l’imperceptible petite larme au sortir de sa performance a du en émouvoir plus d’un au sein de l’assistance.
Cette dernière prenant alors le chemin de la sortie à la fois émue et comblée par un festival appelé, s’il persiste dans cette voie, à devenir un incontournable total de la place amienoise.
Photos William Dumont.