A la fois classieux et insoumis, l’album, riche, produit un effet insidieux et instaure des trames prenantes, qui même sur la longueur et un Cyclope & Othello qui avoisine les dix minutes, séduit par le beauté de son instrumentation. La capacité de composition de Louis Warynski, ses ambiances dans le même temps claires et troublées permettent un rendu de haute volée, que les interventions vocales de Gerald Kurdian, sur Vessel arches et son electro gentiment sombre, bardée de sonorités une fois encore bien senties, ou de l’excellent Matt Elliott sur Moth, flame, sobre et « flou » à la manière d’un Tiersen sur ses derniers essais, viennent magnifier.
Entre les deux, le violon de Fritz Lang, majestueux et habilement couplé à des synthés tout aussi bien utilisés, et la diversité des climats générés auront envoûté l’auditeur et assuré son voyage mental et sensoriel, le temps, aussi d’un faussement posé et bien nommé L’eau qui dort. Doué, défricheur, Chapelier Fou se montre à peine moins intéressant sur Le tricot, à mon sens trop peu développé eu égard à sa trame prometteuse, mais comble vite ce petit manque à l’occasion de Protest, animé par des percus tapageuses et des sons syncopés, lumineux, dont l’alliance enfante une superbe réalisation. P magister, enlevé et précédant le Moth, flame cité plus haut, confirmant brillamment dans sa qualité un contenu sans écarts notables, entre sérénité apparente et bifurcations maitrisées vers des chemins de traverse savamment orchestrées par Louis, sans réel équivalent dans un créneau qu’il a de toute façon lui-même façonné et défini.
Un album racé, à « aller chercher », dont la texture risque fort de générer, au delà d’écoutes insistantes, une forme de dépendance sonore et stylistique.