Mais avant cela, place était donnée à la (re)découverte avec Petite Vengeance, duo expérimental de talent, instinctif et pratiquant un jazz-rock, à défaut de classification précise, de caractère. Issue du Label Vibrant (association unissant des musiciens, plasticiens, techniciens et bénévoles de Rouen), tout comme Syntax Error qui suivra, la paire se démarque et instaure, entre élans feutrés et écarts bien plus bourrus, un style certain, avec panache et dans un esprit de révolte que le bouillant F.A.J. illustrera parfaitement. Décalé et de qualité, Petite Vengeance honore et résume bien le collectif, dans une musicalité de tous les instants que la polyvalence des deux intervenants renforce incontestablement.
Petite Vengeance
L’entrée en matière est donc fort plaisante et après cela, Syntax Error, qui s’était déjà distingué aux découvertes normandes du Printemps de Bourges, investit lui aussi la scène sans faillir avec son rock agité, fait de brisures et de « high energy ». Friendship loyalty computers ou Introduction, galopant, et nombre d’autres compositions tranchantes, jouées avec l’impact d’un trio acéré, vont rendre le set hautement estimable et parfaire une soirée forcément passionnante, le 106 ayant une fois de plus fait le bon choix, local qui plus est, pour entourer The Ex. De cavalcades trépidantes en passages plus lestes (How sensitive), Syntax Error fait une fois de plus es preuves, dans la lignée de Fugazi, pour faire court, et selon une énergie jamais prise en défaut. La vigueur des morceaux, leur inspiration et leur texture entre vitesse et modération puissante font la différence, à l’instar d’un répertoire irréprochable.
Syntax Error
D’ores et déjà réussie, la soirée allait s’avérer mémorable, The Ex et sa pléthore de morceaux abrasifs mais groovy signant un concert de toute première qualité sans temps morts, ponctué par les interventions, en Français s’il vous plait, du nouveau chanteur Arnold de Boer. Moore et Hessels riffent à tout va, Katherina Boornefeld charpente le tout avec l’énergie…d’un homme et sans crier gare, les géniteurs de l’excellent dernier album en date, Catch my shoe, balancent une impressionnante série de chansons entre post-punk et ouvertures africanisantes encanaillées. C’est à la fois brut et dansant (Double order, irrésistible!) et l’enchainement des morceaux, dans la simplicité et un éclairage réduit au minimum, fait très vite mouche auprès d’un public sur les cimes du bonheur.
The Ex
Le jeu de scène de The Ex, mouvementé, ajoutant à l’impact de son gig, sauvage, allié à un carnet de chansons dont aucune ne faillit, il va sans dire qu’on vit là, on ne les compte plus dans l’enceinte du 106, un moment dont on ressortira secoué et la tête dans les étoiles, avec la certitude renouvelée que les néerlandais, présents depuis le début des 80’s, n’ont en rien perdu leur fougue et leur savoir-faire. Ceci dans une expérimentation toujours juste et sous couvert d’une instrumentation fougueuse et de choix. Galvanisante, l’apparition du quartet des Pays-Bas souligne la forme et la dextérité d’un groupe qui doit autant au punk qu’au post-punk ou encore au jazz déviant, et réussit l’amalgame juste et accompli des tendances explorées.
Avec pour effet, ce soir, d’engendrer l’une des soirées les plus marquantes depuis les débuts de l’équipe d’un 106 solidement implanté en zone portuaire rouennaise.
Photos William Dumont.