Dirty Beaches
Surprise, Alex Hungtai, Taiwanais de naissance et cerveau de Dirty Beaches, se présente flanqué d’un saxophoniste dont le béret, curieusement, rappelle Alan Vega. Le rapprochement n’est pas du au hasard et la présence de ce second musicien, allié à la démence créatrice de sa tête pensante, accentue le côté expérimental, génialement prenant, de Dirty Beaches. On pense bien sur à Suicide sur Horses, par exemple, mais l’exécution des morceaux de Badlands fait émerger une identité propre chez cette formation culte et justement adulée par la frange la plus décalée du public. La folie de l’univers créé subjugue et les balafres de saxo apportent un plus à ce set qui tient toutes ses promesses et bien plus, dont le seul « défaut » est finalement d’être trop court.
Dirty Beaches
Il ne s’en avère que plus notable encore et entre les dissonances de Highway king et la cadence associée à des vocaux affolés de Sweet 17, le show, minimal et magistral, produit un gros effet. Hungtai joue aussi un A hundred highways superbe, presque crooner et émaillé de scories noisy du plus bel effet, et dévoile l’immensité de son talent à un Club fourni et enthousiaste, on le serait à moins. Avec le superbe Lord knows best en fin de parcours, sans parler des autres morceaux offerts, la pertinence de sa présence et de son ouvrage est entièrement validée et le quidam peut, dans l’attente, s’installer provisoirement, la tête dans les étoiles, aux abords du bar du 106.
Cults
Arrivent ensuite Madeline Follin et Brian Oblivion soit Cults, affublés de trois musiciens, qui ne tardent pas à enflammer le public avec les imparables morceaux de son opus éponyme. Entre accents à la Ronettes, délicieux, et lézardes noisy à la manières des Raveonettes, Cults impose une belle dizaine de chansons de haute volée, dont le côté « déjà entendu » est vite masqué par la classe qui s’en dégage (Go outside et ses jolis sons) ou le bruitisme exalté d’un Abducted tubesque en diable. Décorée par des envolées de synthé sobres et d’un appoint certain (Go outside, encore, et plusieurs autres essais), l’atmosphère élaborée par les Américains prend, live, une ampleur estimable, et complète avec un peu plus de « sagesse » dans le ton la prestation de Dirty Beaches, pour rendre l’évènement immanquable. Très en verve, Madelline chante magnifiquement et transcende Bumper, aidé par son acolyte habituel et son clavier-guitariste, ou encore Never saw the point et l’intégralité du gig. Les compositions de l’album sont pour ainsi dire toutes optimales dans la qualité et enchantent leur monde par ce juste milieu trouvé entre mélodies soignées et dérapages plus « wild » et tout comme Dirty Beaches, la seule critique à émettre serait la brièveté du concert.
Cults
Qu’à cela ne tienne, le 106 nous a pour le coup et une fois encore gratifiés d’un moment exceptionnel, en attendant entre autres Zone Libre+Casey ou Herman Dune, inscrits aux festivités à venir de l’endroit.
Photos William Dumont.