Comment s’est passé l’enregistrement de « Blood On My Keyboard » ?
On a fait ça pendant la précédente tournée américaine. On a fait ça à Memphis, très vite, suite à la fin du concert qu’on a donné là-bas, dans la salle il y avait le directeur de la section musique et enregistrement de l’université, qui a beaucoup aimé le concert et nous a proposés d’enregistrer sur une journée. On y est retournés dix-quinze jours plus tard, en septembre (2010).
Les morceaux étaient déjà écrits ?
Ils étaient en période de rodage, on en profitait pour les jouer sur scène, et une fois en studio, on a vraiment fait en sorte de faire quelque chose de différent du précédent, qu’on avait mis beaucoup de temps à faire, en faisant beaucoup plus de live.
Il n’y a pas eu de regrets à la fin d’avoir travaillé si vite ?
Étienne : On a continué à travailler dessus ensuite : il y avait des voix que l’on avait pas eu le temps de faire, mais l’axe guitare-claver-batterie, on l’a fait là-bas. On a fini les trucs en France, dont un morceau qu’on a enregistré très vite.
Les conditions d’enregistrement là-bas vous ont convenu ? C’était quelque chose que vous ne pouviez pas avoir en France ?
Étienne : Disons que l’on aurait pas pu avoir ça gratuitement.
Donc, ça s’est fait comme ça, sur un coup de tête ?
Philippe : Le mec nous a dit : « On va avoir du fun », on ne savait même pas ce qu’on allait faire !
Étienne : On savait qu’on allait enregistrer avec lui, mais pas qu’on aurait tout un EP. On lui a dit qu’on avait quatre nouveaux morceaux à enregistrer, et comme il avait des élèves à former, on les a eus avec nous la journée.
Philippe : Ils nous passaient les micros, c’était marrant.
En gros, vous avez eu des internes ?
Exactement !
C’était quand même pro ?
Emmanuel : Oui, ils étaient discrets, ça allait très très vite en termes d’installation. On n’a pas eu grand chose à dire, on a juste joué, et on a été assez vite satisfaits du résultat.
C’était assez relax finalement ?
Philippe : Oui, on était super crevés, on s’est contenter de jouer, on a commencé à 8h, on a terminé à minuit. Et le lendemain, on prenait la route pour Philadelphie, avec donc douze heures de route au programme.
Vous pensez que ça a joué sur le son, les morceaux ? Quatre morceaux en seize heures, c’est rapide…
On les avait quand même rodés sur scène, on n’a pas eu à les écrire. Mais ça reste rapide pour être content du résultat et tout. Après, on en discute encore aujourd’hui, mais c’est obligé. Ce qui était bien, c’était d’aller à l’encontre de ce que l’on avait fait pour « Girouette », retrouver un peu de spontanéité.
Du coup le format de faire un six titres, ça a été dicté par ça ?
Non, pas vraiment… On voulait sortir quelque chose rapidement, rapport au fait qu’on était devenu un trio (le groupe était un quatuor à l’origine sur « Girouette », ndlr), on voulait marquer le coup.
Étienne : Cette journée d’enregistrement, ça a quand même précipité les choses.
Emmanuel : On avait envie de continuer.
Le choix de faire un vinyle, un bel objet, s’est imposé comment ?
Étienne : On était complètement libres, on a eu envie de faire un vinyle, parce qu’il y a un engouement pour le format en ce moment, et que certains d’entre nous étaient assez excités à l’idée de faire un vinyle. C’est quelque chose d’assez courant…
Emmanuel : En ce moment, les gens achètent la musique sous forme immatérielle, du coup, on eu envie de faire un objet qui apporte une valeur ajoutée.
Étienne : Plutôt faire un vinyle qu’un cd, vu que les disques au sens physiques n’ont plus trop de sens actuellement pour les gens…
Vous aviez le soutien d’un label ?
Philippe : Non, on a tout fait par nous-mêmes. Parce que c’est plus simple, ça va plus vite, et à la fin, tu récupères tout, tu n’as pas de comptes à faire.
Tout faire par vous-mêmes, le sens du système D, c’est quelque chose qui revient souvent chez General Bye Bye…
Le booking, c’est moi qui m’y colle. Et j’ai discuté avec des agences spécialisées, qui m’ont avoué qu’elles ne trouvent parfois pas plus de dates que celles que les groupes qui s’y mettent arrivent à dénicher eux-mêmes. Trop de groupes, trop de trucs, c’est ingérable. Après, c’est un travail de réseau, s’adresser à des groupes, des salles…
Il y a des familles qui apparaissent ? Des affinités où vous vous serrez les coudes ?
Emmanuel : Ce n’est pas qu’on passe tout notre temps ensemble, mais on garde contact, on se soutient. Et c’est tellement différent pour chaque groupe, selon son fonctionnement, ses personnalités, que l’on ne peut pas calquer notre fonctionnement sur un autre…
Ce n’est pas usant d’être aussi un « business-man », en plus d’être un musicien ?
Philippe : En fait, plus c’est efficace, moins ça me prend de temps, c’est un cercle vertueux. Plus on joue, plus on existe… Le nom circule, les vidéos sont vues, quand on a fait notre levée de fonds, ça a marqué les esprits. c’est un investissement à long terme.
Vous avez fait des levées de fonds pour vos deux tournées aux États-Unis, est-ce qu’il n’y a pas un risque à répéter la chose ?
C’est vrai qu’on en a fait deux en six mois ! Après, je pense que c’est à la fois positif et … Disons qu’actuellement, le système des subventions, ça tourne à vide, et il n’y a aucun groupe ou presque qui peut assurer à une salle qu’il y aura cent personnes à 10 euros le billet.
Si, il y a Mélanie Laurent…
Tu sors ! (rires)
(La discussion s’égare sur les mérites, discutables selon les gens présents, du talent de l’actrice néo-chanteuse…)
Le futur de General Bye Bye, il s’inscrit comment ? A part des dates, des dates…
Philippe : C’est une bonne question (sourire). On y réfléchit, on a des nouveaux morceaux.
Finalement, des morceaux que vous pourriez mettre en vente par vous-mêmes sur Internet ?
Je viens de lire un article sur le sujet, qui explicitait que faire des albums, système ancien et obsolète, peut te faire perdre ton public à cause de l’attente entre deux, et que ça permet de créer une continuité que de sortir un ou deux titres tous les trois mois.
Emmanuel : Finalement, c’est le système des années 50, les singles. Sauf qu’ils en sortaient douze par an !
Beaucoup ont parlé de revenir à ce système, mais peu l’ont fait…
Emmanuel : C’est super dur ! Parce que ça demande des moyens, c’est un gros travail, certains craquaient sous la pression.
Philippe : Dans notre cas, c’est réalisable, parce que techniquement, ça fait chier : ça demande du temps, l’enregistrer, etc… Je pense que c’est important aussi de jouer les morceaux sur scène, histoire de te rendre compte si une partie est trop longue par exemple.
C’est quelque chose que vous percevez sur scène ?
Étienne : Oui, beaucoup. On ne sait pas exactement ce que pense le public, mais n y est attentifs.
Philippe : Dans le train (le groupe a joué dans l’idTGV, ndlr), une dame m’a demandé le nom de mon instrument. « Un kantele », « ah, c’est un bon mot pour le Scrabble ! ».
Et ça donne quoi, un concert dans le TGV ?
Étienne : C’est un bon exercice de surf, ça demande pas mal d’équilibre !
Philippe : C’est super, tu joues devant des gens qui ne sont pas prédisposés à écouter de la musique, aller à des concerts, pas des hipsters… c’est très positif. Mais c’est compliqué, c’est totalement acoustique…
Le quizz… Soyez spontanés : quel est selon vous le meilleur endroit pour écouter de la musique ?
Philippe : L’église, pour le recueillement.
Étienne : Chez soi, au calme. Au casque, dans le noir ! (il revient sur sa réponse) : une salle de cinéma, c’est super pour la musique !
Emmanuel : Je pense que c’est dans un studio d’enregistrement, avec le matos qu’il y a.
Si j’allais chez vous, quel serait le disque le plus surprenant que je trouverais dans votre discothèque ?
Étienne : Le premier cd que j’ai acheté, c’est un quatuor de soul des années 90, En Vogue, avec des tubes dessus.
Philippe : J’ai pas de disques, je ne suis pas attaché à l’objet. J’ai peu de temps pour en écouter, mais les disques que j’ai remis sur mon ordi uite à son crash : Black Heart Procession, This Is the Kit et un disque de kantele.
Emmanuel : J’ai beaucoup de trucs improbables, même des trucs pour faire de l’aérobic…
Donc à General Bye Bye, on fait de l’aérobic le matin !
Philippe : On aimerait bien (rires) ! Au lieu de ça, on se retrouve à manger des burgers…
Quel est votre Beatle préféré ?
Philippe : Je déteste les Beatles.
Etienne : George Harrison.
Emmanuel : John Lennon.
Meilleur souvenir de concert ? En tant que musicien et en tant que public ?
Philippe : Dans le public, The Ex en 1995 aux Instants chavirés.
Étienne : Graham Central Station, à Paris vers 1994/95.
Emmanuel : Liars, par effet de surprise.
Et donc le moment où vous vous êtes dit « Là, on a fait un super concert ! » ?
Étienne : San Francisco, le public faisait presque des pogos, ça nous a beaucoup plu.
Philippe et Emmanuel : Tucson, c’était vraiment super, on jouait très proches les uns des autres, ça ressemblait presque à une coopérative communiste !