Force et « mélodisme » sont associés avec une étonnante dextérité, et l’intégralité de Psychodrama nous replonge en terres new-wave, cold et dotées de retombées shoegaze, éveillant une nostalgie stimulée par cette mise en son magistrale tout en gardant un côté actuel délibéré. A second of June s’accapare des éléments de genres qu’on dit « passés », mais qui n’auront finalement jamais autant été d’aujourd’hui, et débute sur le mélodique et saccadé Etching, première pièce majeure de l’opus. La voix d’Elsa Lion accompagne celle de Grégory Peltier avec majesté et l’ambiance évoque The Cure, dans cette dualité entre élans cold dans l’instrumentation et chants plus exaltés. L’instant d’après, Gallery et son rythme plus franc (soulignons également le brio de la rythmique formée par Josh Muller (batterie) et Olivier Stula (basse)), animé entre autres par les synthés, dignes de l’époque à laquelle se réfère le groupe, mais aussi des guitares impétueuses, sublime lui aussi des mélodies intenses, vaporeuses parfois, portées par un flux rock impossible à endiguer, avant que Sleep widow, sa basse cold menant la danse de concert avec un organe vocal entre un Smith rassénéré et un Curtis moins tourmenté, ne vienne à son tour passionner l’auditeur, privilégié, et valider….la validité de ce nouveau disque unique.
Cold et new-wave prennent ici de nouveaux atours, presque poppy sur Seagulls in a bag, et auront rarement été, dans un même mouvement, aussi intenses et fringantes, fines aussi comme à l’occasion de The heir, subtil et aérien. La pluralité des ambiances est d’ailleurs à saluer et donne plus d’envergure encore à un album digne de son label, Peanut et son amorce mélancolique haussant presque soudainement le rythme, sur fond de guitares acides, pour imposer sa trame à, la croisée des genres, valorisée autant par ses six cordes que des synthés spatiaux et des voix au « chaud et froid » singulier et décisif.
Dans une veine saccadée, et un climat faisant ressurgir l’esprit du magique Disintegration de The Cure, de même que le désenchantement de Pornography,The valley of the assassins complète ensuite l’oeuvre avec classe, de façon sombre, offrant en sa fin une cadence plus directe et des chants entremêlés du plus bel effet.
On le comprendra aisément, chaque composante de Psychodrama mérite d’être mise en avant et pour une fois qu’un album se montre captivant de bout en bout, faisons-lui honneur et ne boudons pas notre plaisir, décuplé par Memories of us, sa sensibilité pop mâtinée de shoegaze, un shoegaze discret et fulgurant, émanant autant des voix que de l’instrumentation, à la manière, peut-être, d’un Ride sur les titres les plus alertes de Nowhere
C’est ensuite Why hands are better than wings, à l’intro electro, brumeuse dans le chant et bien sentie, qui assène un arrière-plan au carrefour des genres, cohérent à l’extrême, et sort ensuite légèrement de sa délicieuse torpeur pour s’affirmer et faire mouche à son tour. Et, à peine remis, on « encaisse » l’énergie de 70days, à la cold giflée par des grattes aux riffs durs et ornée de claviers guillerets, la rythmique y faisant elle aussi feu de tout bois. Une fois encore, le résultat obtenu étincèle et n’appartient à aucune caste précise, s’inscrivant avant tout dans un amalgame personnel et abouti des tendances abordées par le groupe.
La conclusion revenant à Shy ink #2, dont les accents early 80’s de départ émerveillent et laissent ensuite cet incroyable mixture entre styles et époques achever les festivités, et un opus qui n’aurait pas dénoté, s’il est chez les géniaux Herzfeld, chez Infrastition ou Fatal Object, il est bien évident que ce Psychodrama complet, intégralement réussi, est à ranger parmi les ouvrages majeurs de cette première moitié 2011.