La base est toutefois assez nettement shoegaze et ici, le groupe exhale des effluves 90’s délectables, déclinées selon un éventail élargi et porteurs d’une mélancolie contagieuse. Celle-ci s’exprime d’entrée de jeu, à travers le flou d’Anima mundi et des voix rêveuses, dream-pop, superbes, et si ce morceau d’ouverture probant se veut retenu, le rythme s’envole sur Your yes sounds like no!, vocalement proche de ce qu’a pu faire Robert Smith, aux guitares vibrantes et aussi exalté que tempéré en certains endroits.
Mélodiquement, l’essai est de taille et ces mélopées attachantes se voient emportées par le flux d’un shoegaze multiformes, affirmé et saccadé sur Above the view. Les vocaux, aériens, ajoutant au charme indéniable, et durable, du tout, version personnelle de tout un pan des 90’s.
Adrien Boué, Simon Chaubard, Romain Barbot et Luc Ferré réussissent le coup parfait, allient force de frappe et ton allégorique avec tact et sensibilité, et varient les climats avec à propos, le dénominateur commun à tout cela tenant dans la « grisaille » adroitement mise en son des compos du quatuor.
Même sur une trame moins vive (Would you be my sample?), le rendu attire et, mieux, étend le discours du groupe, aussi performant dans ces atmosphères dénudées, celle du dit titre bénéficiant d’un saxophone discret et décisif. Et lorsque le ton se fait plus épais, avant de retrouver de la clarté sans se dévêtir de ses élans aigres-doux et de sa sensitivité pop (From dawn to noon), on s’envole avec Montreal on fire dans ses errements spatiaux et son allégorie attractive. Des choeurs merveilleux accroissent même l’impact de la chanson, puis un Excuse my French alerte, porté par des guitares bavardes et cinglantes et des voix plus en avant, produit à son tour un effet conséquent.
Anima mundi comptant dix titres, il nous en reste alors trois, Wave your arms s’annonçant lui aussi alerte, orné de guitares fines, fort de cette même capacité à plaire et d’une énergie porteuse.
Les garçons peuvent ensuite ralentir le tempo sur Sad dreams on cold morning et ses atours Ride sans le crachin sonique qui le caractérise, autre réussite éclatante du disque, avant de finir avec un I was born again tonight justement décoré par des sons flous et noisy qui ne sont pas sans rappeler le Loveless de My Bloody Valentine, avec une dernière minute épurée.
Et on tient, à l’arrivée, un album parfait, individuel et sacrément intéressant, qui outre ses qualités énormes a pour mérite de nous faire découvrir un groupe hexagonal talentueux au possible.