Depuis, Guillaume et Benjamin se sont attelés, aidés en cela par une bande de potes, dont Anthonin des Bewitched Hands, autre groupe rémois de valeur, ou encore Gonzales, Tim de Wave Machines ou encore Esser, à nous préparer ce premier long jet d’une perfection totale, que ce soit dans l’apaisement (Crack my bones et sa pop légère) ou sous le joug d’une énergie débridée (Time to dance et ses prétentions post-punk dansantes, ainsi que ses voix entremêlées et ses sons délicieux dont l’omniprésence rend ce morceau indispensable).
Une diversité de styles maitrisée à souhait est à mettre en avant; on passe par exemple d’un Cliché electro-soul enivrant à ce Crack my bones à la vêture quasi trip-hop, The Shoes ayant le don d’instaurer de façon récurrente des décors musicaux somptueux. Et le procédé n’entache en rien la tenue de l’ensemble et sa complémentarité, Bored succédant à ces deux titres, drapé d’atours electro-cold et d’intonations 80’s, avec le plus grand naturel.
Ailleurs, on profite pleinement de Stay the same, excellente ouverture qu’Esser rend meilleure encore, exercice electro-pop agité, aux sonorités justes et ingénieuses, ou d’un Cover your eyes ou la paire est épaulée par Tim et sert un essai pop aux relents funky auquel on succombe bien vite. La haute qualité des ornements liés à chaque plage contribue à parfaire le tout, également au sommet sur un People movin’ sur lequel l’electro des Champenois cohabite avec, comme sur Cover your eyes, des instants funky, et qui vient magnifier cette triplette introductive imparable.
Aussi dansant que pensé, Crack my bones recèle aussi un Wastin’ time à la mélancolie magique sur son intro, dont les choeurs et la pop désabusée, malmenée par des percussions mises en avant, font merveille. Sa fin de parcours, impulsée par The wolf under the moon et son rythme vif, bien breaké par le piano de Gonzales, les chants simultanément rêveurs et enlevés, allant de pair, venant créditer d’autant plus cette dernière ligne droite. Celle-ci prenant fin sur Investigator (s’il s’agit d’investigations sonores, on soulignera à quel point elles sont, pour le coup, porteuses et réussies), dont l’electro porté par des basses charnues, doublées de percus en cascades, suscite le même émerveillement qu’à l’occasion des neuf autres chansons.
A l’aise et ingénieux quel que soit le style pratiqué, The Shoes signe de toute évidence l’opus parfait, face auquel on ne peut rester immobile ni indifférent et qui, non-content de recourir à des genres différents et bien investis, démontre une étonnante faculté à tirer le meilleur de ceux-ci pour imposer, au final, une alchimie personnelle diablement persuasive.