Pour l’occasion, les formations retenues étaient de nature à attirer un large public, puisqu’il s’agissait de Pollux From Rio, dont nous nous apercevrons qu’il s’agit là d’une bien belle découverte, la paire Lilloise Curry and Coco et sa pléthore de tubes 80’s imparables et Jamaica, dernière sensation parisienne, justifiée celle-là, en date.
Ce sont donc les premiers qui ont ouvert le bal, devant un public étonnamment juvénile et d’un enthousiasme parfois débordant, et imposé une belle série de titres entre rock groovy et vivace à la Foals, post-punk mâtiné de funk façon The Rapture et trouvailles sonores dignes d’intérêt. Le tout sous couvert d’une touche perso de bon aloi, qui, sans complètement estomper les influences citées, fait de la formation francilienne une découverte à faire toute affaire cessante.
En outre, le quatuor fait preuve, sur scène, d’une joie de jouer qui accentue la qualité de ses sorties, et d’une énergie jamais prise en défaut, bien régulée, enchainant les petites perles telles Monochromatic et sa basse entêtante alliée à des riffs malins, ou Hold my hand and dance, parfaitement représentatif de l’habileté de la dite bande à élaborer des plages dansantes et obsédantes, de celles dont l’écoute génère une forme d’addiction nullement nuisible, bien au contraire.
On a pu aussi déceler, dans ce flux délectable, une chanson en Français, O, plus poppy, d’une joliesse appréciée, Pollux from Rio ayant toutefois l’intelligence de ne recourir à notre langue que de façon très occasionnelle, ou un We are all scared aux parties de claviers délicieuses et chants entremêlés remarqués, entre autres réjouissances audibles lors du set. Et on tient donc, à l’issue de ce temps fort tenant lieu de parfaite mise en bouche, une trouvaille dont il ne serait guère étonnant qu’elle fasse à nouveau parler d’elle dans un avenir proche. Une sensibilité pop venant ajouter à son charme comme sur le titre précité, de même qu’un bel alliage entre touches cold mesurées et electro diablement entrainante (You are terrible). On pense aussi aux bordelais d’Adam Kesher pour ce brassage des styles et ce penchant à l’individualité, et on ressort ébahi de cette prestation, que Curry and Coco avait donc pour tache de prolonger.
Curry an Coco
Le duo allait s’en sortir avec son brio habituel, fort de ses titres phares issus de We are beauty et d’une vigueur déterminante, la coloration 80’s émanant de ses compos n’étant certainement pas étrangère à son pouvoir de séduction. les Nordistes surprennent toujours par leur formule aussi inattendue qu’efficace, et les morceaux comme Who’s next, aux synthés simples et hautement efficaces, ou Top of the pop, Sex is fashion ou encore Yummy mummy, pour faire court, raflent la mise sans forcer, repris en choeur par le public. Curry and Coco a donc trouvé la formule et s’il devra confirmer, à l’avenir, ce style assez unique, sans le réitérer au point se sombrer dans la redite, ce dernier suscite pour le moment un engouement conséquent et aucunement usurpé. Le seul regret tenant dans la durée réduite du set, le registre du groupe étant pour l’heure encore restreint. Ce qui n’empêchera pas le public de manifester sa joie et les Curry and Coco d’enfoncer le clou de leur « pop de danse », comme ils se plaisent à se définir, aussi captivante qu’a pu l’être le concert de Pollux From Rio.
Les débats n’étaient toutefois pas terminés, Jamaica nous faisant ensuite le plaisir d’un set mordant, grungy et cohérent, dont la teneur a elle évoqué les early 90’s et réjoui les spectateurs les plus rock, dans l’esprit, présents devant la scène. Avec en « bonus » un titre joué pour la première fois depuis un bon moment, les titres de l’impeccable No problem, aux touches new-wave que malmènent des soubresauts grunge décisifs, magnifiés par quelques élans pop judicieux, faisant d’emblée la différence et confirmant les vertus du groupe fondé par Antoine Hilaire et Flo Lyonnet, aux duels guitaristiques et attitudes trahissant une belle complicité, parfaitement épaulés par un batteur au jeu percutant qui charpente sans faiblir les nombreux standards de l’album rouge et blanc, entre Cross the fader, Jericho, By the numbers et, en conclusion, l’impeccable When do you wanna stop working?…à l’issue duquel deux jeunettes rémoises se sont retrouvées sur scène, l’une d’entre elles héritant de la guitare après un final noisy digne de Thurston Moore and Co.
Jamaica possède lui aussi un style qui lui est propre, entre les genres et les époques mais d’obédience rock avant tout, et en fait le fer de lance, acéré, de ses prestations scéniques qu’on imagine toutes aussi abouties, « wild » et accomplies que celle vécue à la Cartonnerie.
En conclusion, nul besoin de forcer le trait pour rendre compte du contenu, excellent, de l’évènement, et des qualités de ces trois groupes dont l’existence et le parcours renforcent et dynamisent la scène hexagonale, tout en offrant à des salles comme la Cartonnerie l’occasion de soirées qu’on souhaite revivre au plus vite.
Jamaïca
Photos Lucile Emma.