C’est donc la légende shoegaze et ancien comparse d’Andy Bell dans Ride, Mark Gardener, qui allait lancer le bal…par le truchement d’une prestation ennuyeuse, seul guitare en main, balayant d’emblée l’espoir que nous caressions, nous les nostalgiques de l’album à la vague bleue, de le voir officier avec un groupe et s’adonner à un shoegaze incluant des titres de Nowhere, donc, ou encore de Going blank again. Rien de tout cela donc, et Mark s’est contenté d’aligner les titres folk, pas forcément déplaisants mais manquant singulièrement de coffre et tournant vite à la redite. Ce qui ne gâche toutefois pas le plaisir de voir le bonhomme « en vrai », celui-ci se rattrapant avec brio plus tard dans la soirée en accompagnant les Molly’s.
Ces derniers, prévus donc en seconde position et auxquels incombait la lourde tache de précéder les Warlocks, allaient eux aussi livrer un set à mon sens en demi-teinte, pêchant au niveau du son, parfois confus bien que les avis de tous soient partagés sur ce point. Si la qualité des compos et notamment du nouvel album Sighs of the night ne sont pas à mettre en cause, il faut avouer qu’on a connu mieux de la part des Amienois, bien plus convaincants deux jours plus tard à la Manufacture de Saint Quentin.
Cependant, une partie de leur prestation fut tout de même solide et distincte, et on sentait ce soir-là qu’il leur fallait se remettre dans les rails du live, ce qu’ils firent d’ailleurs d’une façon de plus en plus probante au fur et à mesure de l’avancée du concert. Globalement acceptable donc, jalonnée de temps forts tels que Fast slow motion, Night Blooms ou Would you ever, pour faire court, les morceaux de l’opus à sortir tenant largement la route, la sortie des icônes locales, conclue de plus par l’apparition au chant du sieur Gardener sur Tastes like sedative, petite pépite du disque mentionné plus haut, et une intense et émouvante reprise de Ride, se voulait annonciatrice de venues futures probantes et abouties, celle de Saint Quentin constituant pour moi la toute première d’entre elles et étant d’ailleurs destinée à faire l’objet d’un article prochain en ces colonnes.
Warlocks
A l’issue de cette sortie perfectible mais ayant néanmoins déclenché les vivas de la foule, les Warlocks, plus qu’attendus, débarquent…pour jouer en tout et pour tout quarante-cinq minutes, prenant soudainement la poudre d’escampette après quelques pépites d’un rock sulfureux bien que la plupart du temps léger, duquel émerge en certaines occasions une belle sensibilité pop et qui, dès lorsqu’il s’emballe et hausse le rythme, ou fasse dans un psychédélisme étourdissant, fait des ravages au sein d’un public qui n’attendait qu’une chose: que les Américains fassent durer le plaisir, varient les ressentis et nous régalent par exemple du contenu de leur dernière sortie discographique en date, le riche et délectable Rise and fall (EPS and rarities). Un set bien trop court donc, qui ne fait qu’aviver les regrets tant les géniteurs de The mirror explodes ou Surgery, références à posséder dans toute discographie digne de ce nom, paraissaient « lancés » et prêts à en découdre.
Ce onze novembre fut donc synonyme de frustration, le programme, pourtant de choix, nous laissant quelque peu sur notre faim. Mais compte tenu de la valeur des intervenants, il est plus que permis de leur accorder le bénéfice du doute, tant on les sait performants et à leur aise sur les planches, pour les voir en d’autres occasions où, je n’en doute pour ma part aucunement, ils se montreront à la hauteur de nos espérances.
Photos Lucile Emma