Baigné par le rock pluriel et unique des angevins, Wil propose donc ici onze reprises, après un choix délicat compte tenu du répertoire de la formation ayant signé tant de joyaux, de Still angry, still hungry à Tout doit disparaitre en passant par I.A.B.F. ou encore As happy as possible et Strike.
On part du fabuleux I love you so, que T.S.T. dote d’un tempo plus saccadé qu’à l’origine, caractéristique par exemple de l’excellent My head is a nightclub dont il fut l’auteur, et de scories noisy-shoegaze forcément louables, pour arriver à un Sunday time leste et lancinant puis bien plus vif, logique puisque ce formidable hommage prend fin sur une cover surprise de Inside room, l’un des hymnes de Still angry, still hungry.
Entre les deux, on trouve Assez, le semi-instrumental détonnant issu de Strike, ou Waiting, splendeur poppy tendue issue de ce même opus, et Bad news from the heart remis au goût du jour façon T.S.T., à renfort de rythmes electro entrainants au possible, repris sans se voir dénaturés et formant un ensemble qui inspire à la fois respect, envie, nostalgie et suscite une écoute compulsive. Pierre-Yves Sourice lui-même, ancien bassiste des Thugs, a approuvé l’initiative et le morceau suivant, un Strike lui aussi finement « haché » par ce musicien dont tout ce qu’il entreprend se solde par autant de réussites décalées et éloignées de toute convention préétablie, lui donne définitivement raison. Le côté fonceur des morceaux initiaux est habilement préservé, ce que démontre par exemple A chance que suit…cette perle de And he kept on whistling, tirée elle de I.A.B.F. et bénéficiant d’un traitement similaire aux autres titres. Le reliftage façon Teenage Sin Taste correspond d’ailleurs parfaitement aux plages choisies, et les souillures noisy, dont celle qui achèvent And he kept on whistling, elles aussi de circonstance tant Les Thugs possédaient un son à la fois flou et distinct, bruitiste et poppy, reconnaissable entre mille.
On a ensuite droit à Suspended time, proche du « vrai » et donc punk-rock à souhait, puis un Looking in your eyes un peu freiné mais incoercible, épais et touffu, avant le Sunday time terminal. Et on constate, passé les premières écoutes, que nul n’est besoin de triturer une chanson, de la passer à travers tous les filtres possibles, pour la reprendre avec brio et à-propos.
L’essai est donc réussi et ravive l’espoir d’une hypothétique reformation d’un groupe qui, aux côtés de Sloy, Drive Blind et autres figures de proue de cette époque inoubliable, aura fait bien plus que de tirer son épingle du jeu. Il nous reste donc, pour l’heure, ce Dreamers’ songs de feu et la discographie des Thugs, que nous sommes déjà nombreux à éprouver sans relâche, avec la perspective d’être rejoints par d’autres au fil du temps.