Pour l’occasion, les locaux de Dogma, nullement impressionnés par l’opportunité, allaient livrer un set solide en première partie, à la fois puissant et mélodique et trouvant sa source dans un rock à la fois direct et nuancé, puissant et torturé, au sein duquel les climats se succèdent et se complètent dans la plus grande cohérence. Trente minutes d’une prestation révélatrice d’un potentiel qu’un album foisonnant avait déjà exposé au public, dont on regrettera juste la courte durée tant il est évident que le trio possède les qualités nécessaires à percer et s’imposer.
Passé cet « apéritif » de choix, arrivent les Jeunes dieux emmenés par un Franz Treichler au sommet de sa forme, qui attaquent par un Color code puissant pour enchainer avec un certain nombre de morceaux du génial Super ready/Fragmenté, joué en fait dans sa quasi-intégralité, dont un I’m the drug ravageur, El magnifico entièrement exaltant ou encore l’imparable C’est quoi c’est ça, sans oublier, entre autres perles à l’intensité destructrice, Secret, Freeze et ses coups de boutoir rythmiques ou Everythere.
Taillant dans le vif d’une électricité impulsée par le clavier d’Al Comet ou la guitare empoignée en certaines occasions par le sieur Treichler, secondé avec dextérité par Vincent à la basse et la frappe tentaculaire de Bernard Trontin derrière les fûts, le groupe allait aussi jouer les énormes Skinflowers ou Kissing the sun, époustouflants de par leur force et la clarté de leur son, une constante chez les Gods qui, aussi bien dans cette option que dans les réinterprètations acoustiques, offrent un son étonnamment distinct. Distinct comme Lucidogen ou le bien nommé Supersonic, massif et muni de séquences electro « maison », tiré eux de Second nature, mis à l’honneur donc comme l’ont été TV Sky ou Only heaven.
Entre les danses théâtrales du charismatique Franz, magnétique et inimitable de par l’attitude et le jeu de scène qu’il développe, et le reste du groupe, d’un Vincent Hänni grave, au groove de basse démentiel, un Al simultanément hilare et concentré tirant de son Akai MX76 des giclées acides dont il a le secret, à Bernard, technique et percutant, les Helvètes ont donc une fois de plus impressionné et mis sur le flanc un parterre au milieu duquel on pouvait retrouver des fans quadras, voire quinquas, de la première heure, définitivement sonnés par le Envoyé final, dans un premier temps psyché puis débridé et sonique en diable sur son final, qui nous ramène aux tous débuts des Gods et à ce premier album éponyme et séminal.
Nulle trace du nouvel album donc, ni de classique Charlotte, mais il s’agira là des seuls « regrets » liés à cette déferlante de rock indus de nature à remettre à leur place et à renvoyer à leurs chères études la majorité des formations actuelles. Et susciter chez le quidam, fan ou « néo fan », l’envie de se replonger illico dans la discographie, fournie et singulière, sans faux pas aucun, des Young Gods, en même temps qu’une impatience non feinte quant à la sortie d’un Everybody knows dont je peux déjà dire qu’il produira lui aussi un effet monstrueux.
Superbe set, donc, incandescent, maitrisé de bout en bout et étayé par une collection de titres phénoménaux, dont il faut de plus souligner qu’ils ne représentent qu’une partie des classiques du groupe, parmi lesquels, pour faire court, on peut inclure L’amourir ou Pas mal, ou encore Longue route, dont l’ajout au concert du jour aurait mis un public déjà en transes dans un état second.
Photos Lucile Emma.